Déclaration liminaire des élus SNESUP-FSU au CTU du 6 janvier 2022.

Publié le : 13/01/2022
 
Voeu voté à l'unanimité des 7 votants (SUD-Education n'ayant pas pris part au vote)
 
« La loi de transformation de la fonction publique d’août 2019 a supprimé les prérogatives des CAP notamment en matière de carrières, de promotions et de mutations des fonctionnaires. Cela a été appliqué par le Ministère de l’Enseignement supérieur, de la Recherche et de l’Innovation (MESRI) aux personnels BIATSS et enseignants.

À présent, le ministère entend supprimer les procédures d’avancement de grades au niveau national, opérées par les sections du CNU, pour les enseignants-chercheurs, à partir de 2023. Elles ne seraient plus réalisées que localement au sein des établissements. Or la double voie de promotions permet de prendre en compte de façon complémentaire les carrières et des situations différentes. La voie nationale de promotions  par les sections du CNU, permet de sortir des situations locales de blocage, de garantir l'égalité de traitement des collègues, quelles que soient leurs disciplines, leurs établissements et leurs lieux d'exercice.

Le CT-MESR rappelle son attachement aux instances nationales et académiques. Il demande à nouveau le rétablissement de toutes les prérogatives des CAP après avoir dûment abrogé la loi de Transformation de la Fonction Publique. Le CT-MESR demande également le maintien de toutes les prérogatives du CNU, notamment celles qui concernent les promotions de grade, et le maintien des contingents nationaux disciplinaires d’avancement.

 
 

A l’occasion de ce comité technique ministériel, nous souhaitons interpeller le ministère de manière très synthétique sur quelques points. 

 

Le MESRI a annoncé au bureau de la CPCNU qu’il envisageait la suppression de l'avancement de grade pour les enseignant.es-chercheurs.ses au niveau national opéré par le CNU en 2023. Cette mesure s'ajouterait à d'autres prévues dans le cadre de la LPR remettant fondamentalement en cause les missions de l'instance nationale qu'est le CNU (suppression partielle de la qualification, mise en œuvre du RIPEC, repyramidage des postes d'enseignant.es-chercheurs.ses) au profit d'une gestion essentiellement locale des carrières. La FSU s'opposera fermement à la mise en application de ces mesures et propose un vœu en ce sens.

 

Parmi les points portés à notre information, un certain nombre relèvent de la rémunération. Or, le tout récent rapport ministériel  2021 "Vues d’ensemble  - Les rémunérations dans la fonction publique »[1] fait démonstration de la plus grande disparité d'indemnités :  le salaire moyen net de l'encadrement supérieur (catégorie A+) dans la fonction publique territoriale est de 5 208 € (dont 12,6 % de rémunération supérieure à 6 600 €); dans la  fonction publique hospitalière  de 6 132 € (dont 48 % supérieur à 6 600 €) et dans la fonction publique  d'état, est de 5 841 € (dont 31,8 % supérieur à 6 600 €).

Toujours selon le même rapport, dans la fonction publique d'Etat, concernant ce niveau catégoriel A+,  les énarques  ont un salaire moyen net de 6 539 €  (43,7 % supérieurs à 6 600 €),  les ingénieur A+  de 6 073 € (36,2 % supérieurs à 6 600€). Or, le salaire moyen dans l'enseignement supérieur, recherche et assimilés , qui comporte, rappelons-le, le niveau de formation le plus élevé de la fonction publique et l'entrée en carrière la plus tardive, est de 3 864 € net avec 0,9 % de salaires supérieurs à 6 600 €). Plus précisément, le bilan social 2019 indique un salaire moyen net des enseignants (rémunérations principales + accessoires)  de 3 599€. 

Ces  inégalités de rémunération inter-corps de la fonction publique à niveaux de compétences moyennes égales (...) sont particulièrement criantes et rompent avec le principe d'égalité de traitement. S'agissant donc des rémunérations, le premier travail d'équilibrage des salaires devrait se faire à ce niveau et par l'intermédiaire des grilles indiciaires ! Nous avons des propositions.

 

Concernant les dernières avancées sur le sujet, s'agissant du repyramidage des corps d’EC, nous rappelons qu’il faudrait 5 000 promotions pour atteindre la cible de 40 % de PU parmi les EC, même à effectif constant d’EC que nous savons pourtant notoirement insuffisant, et que le dispositif d'affectation est opaque et le processus d’attribution n'est pas à la hauteur des enjeux. Le Snesup-FSU demande qu'une ligne budgétaire spécifique soit associée au repyramidage et que le Ministère abonde la masse salariale initiale notifiée dans la SCSP.

Nous avons étudié la répartition des promotions entre établissements.  Il faudrait pouvoir disposer des données utilisées et plus de précision sur l’algorithme. Faute de l’avoir, les modalités de répartition s'avèrent opaques et/ou difficiles à comprendre. Sont-elles le fait du prince ou le résultat de la foire d'empoigne au sein d la CP-CBU? En effet, les présents tableaux fournis apparaissent pour le moins contrastés :  8 universités ont déjà un taux de PU supérieur à 40 % et pourtant le MESRI leur accorde 102 repyramidages (14 % des 737 repyramidages accordés aux universités). Par contraste, 23 universités qui présentent moins de 30 % de PU ne disposent que de 89 repyramidages. Enfin comment comprendre que les 13 universités qui comptent moins de 27 % de femmes parmi les PU, ont obtenu un taux de repyramidage en dessous de la moyenne nationale des universités. 

 

Relevons qu'entre 2010 et 2020, hors disciplines de santé, le nombre de femmes PU n'a progresser que de 5,5 % (de 22,2 %  à 27,7 %) et que le nombre de PU parmi les EC n'a progressé que de 1% (de 31 à 32 %) et cela principalement du fait d'une baisse des 342 emplois d'enseignants chercheurs hors discipline de santé (-506 MCF et + 164 PU) et même de -702 EC toutes disciplines confondues[2].

 

Concernant le RIPEC, les chiffres présentés nous font apparaitre en 2028 une enveloppe globale consacrée à la part statutaire (C1) de 293,6 M €. Or, pour 48 000 EC, cela correspond à un montant individuel annuel de 6 100 €. Pour que cette part individuelle s'élève à 6 400 € comme annoncée par madame la ministre, il faudrait soit que cette enveloppe se monte à 307,2 M €. D'où notre question : est-ce que l'enveloppe annoncée est sous-évaluée ou bien est-ce que vous faites l'hypothèse que le nombre d'EC va encore diminuer de 2 000 emplois ?

 

Dans le cadre de PPCR, il a été convenu que toute carrière de la FP devrait pouvoir se dérouler sur deux grades au minimum. Or pour les MCF, il n'existe toujours  pas  de passage automatique de la classe normale à la hors classe, comme c'est déjà le cas pour les enseignants de statut second degré. Qu'est-il envisagé pour mettre en œuvre ce droit ? Dans la même ligne, il serait opportun de faire un état des lieux sur le taux de MCF qui ont obtenu l'échelon exceptionnel de la hors classe depuis sa mise en place.

 

Dans le registre des promotions, nous souhaiterions avoir communication des nombres de promotions et des quotas attribués aux établissements pour les avancements de grade des enseignants-chercheurs en 2020 et 2021. La diffusion de ces données pour 2019 nous avait permis de mettre en lumière que des établissements n’utilisaient pas leurs quotas de promotion, ce qui rabote les perspectives de carrière pour l’ensemble des EC et brise l'égalité de traitement entre les EC suivant leur établissement. Il faudrait examiner ce qu’il en est depuis.

 

Enfin,  alors que le décret statutaire de 1984 stipule que Aucune distinction, directe ou indirecte, ne peut être faite entre les enseignants-chercheurs en raison de leur sexe,. la question des inégalités femmes-hommes reste un problème  récurrent : en dehors du problème de repyramidage  précédemment évoqué, le salaire net moyen des enseignants est de 3 750 € pour les hommes et de 3 373 € pour les femmes (-377€). S'agissant des rémunérations accessoires (primes, indemnités, intéressements, heures complémentaires, vacations) celles-ci sont en moyenne de 10,3 % pour les hommes et de 9,5 % pour les femmes.  Enfin, concernant la Prime d’encadrement doctoral et de recherche (PEDR), qui est la prime au mérite représentant la part la plus importante des rémunérations accessoires des personnels enseignants du MESRI, son montant moyen par bénéficiaire est de 4 839 € pour un homme et de 4 757 € pour une femme, soit une différence de 5,9 %[3] ! 

 

Au final, si des avancées législatives et financières non négligeables ont été apportées sur les rémunérations, si l'égalité femme-homme est une préoccupation collégiale, le SNESUP-FSU rappelle l'étendue des inégalités injustifiables qui sont en cours. Elle appelle donc de ses vœux à une poursuite de plus grande ampleur de la réduction de ces inégalités au sein de la fonction publique et plus particulièrement dans la fonction publique d'Etat, notamment au MESRI.

 


[1] : "Vues d’ensemble - Les rémunérations dans la fonction publique". https://www.fonction-publique.gouv.fr/files/files/statistiques/rapports_annuels/2021/Vues_densemble_3.1.pdf

[2] : sur cette même période, le nombre d’étudiant progressait de 8% dans l’ensemble de l’enseignement supérieur et de 5% à l’université ce qui aurait dû conduire au recrutement de plus 10000 agents supplémentaires dont 5000 EC et à la construction de l’équivalent de 5 universités.

[3] : Bilan social du ministère de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation 2019-2020, pp. 206-220