Appel de la commission administrative du 18 novembre 2021 - Lettre flash n°42

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Publié le : 18/11/2021

 

 

Lors du CNESER du 15 novembre 2021, le ministère s’est une nouvelle fois vanté des énormes efforts budgétaires qui auraient été consentis depuis le début du quinquennat d’E. Macron, et qui seraient, selon lui, historiques. La répartition du budget 2022 de l’ESR votée par l’Assemblée nationale a pourtant été significativement rejetée par le CNESER : 3 voix pour (Medef, CEA), 39 contre (FSU, CGT, Unef, Alternative) et 32 abstentions (dont la CPU, le Sgen-CFDT et l'Unsa). Cette année encore, et pour la dixième année consécutive, le taux d’encadrement et le budget par étudiant vont encore baisser à l’Université et dans de nombreux établissements de l’enseignement supérieur public alors que la situation est déjà en forte tension dans nombre d’entre eux. 

Le CNESER a également rejeté le projet de décret d’application de la LPR concernant les “préciputs” (6 pour, 30 contre, 28 abstentions et 1 NPPV) qui fait la part belle aux appels à projet ANR (+25 % dans le budget 2022), favorise les seul·es lauréat·es d’AAP et renforce les inégalités entre collègues alors que le financement récurrent reste le parent pauvre ( +5 % en 2022). 

Comment, dès lors, se targuer d’un investissement de l’État dans l’ESR à la hauteur des besoins alors que les personnels ont de plus en plus de difficultés à mener à bien leurs missions de service public ? Comme dans le domaine de la lutte contre la crise climatique, la duplicité du discours gouvernemental est insupportable.

Les établissements sont au pied du mur. Les instances votent des gels de postes, quand ce ne sont pas des suppressions, diminuent les volumes d’enseignement de formations, comme en STAPS par exemple, et ont recours à la sélection et/ou à l’enseignement en ligne faute de moyens et de places. Ainsi, le MESRI met en place un “parcoursup adapté” avec la plateforme TrouverMonMaster.gouv qui accentuera le phénomène de sélection et ajoute une charge administrative supplémentaire aux collègues responsables de master dans un calendrier très contraint.

La situation est de plus en plus difficile à tenir dans les établissements face à des locaux vetustes, des bâtiments vieillissants et à des conditions de travail et d’études qui ne cessent de se dégrader. Par ailleurs, lors du CNESER, la CPU a interpellé le ministère sur la non prise en compte du GVT et le financement seulement partiel des mesures et réformes en cours (sous-financement de la réforme des études de santé, de la protection sociale complémentaire, indemnité de télétravail, etc). 

Cet appauvrissement continu des universités s’accompagne de restrictions des libertés pédagogiques (choix du mode d’enseignement par exemple) et de recherche, ainsi que d’atteintes à l’exercice du droit syndical. La croissance des financements par appels à projet, souvent très orientés, ne laisse que peu de marge de manœuvre aux collègues et les oblige à se plier à certaines thématiques et protocoles sous peine d’être laissé·es pour compte. En France, comme dans d’autres pays, on assiste à une multiplication inquiétante des atteintes aux libertés académiques. Frédérique Vidal se prévaut d’avoir permis de libérer la parole alors qu’elle a en réalité favorisé l’accélération de ces mises en cause en évoquant notamment la mise en place d’une enquête sur « l’islamogauchisme ». Partout en Europe et dans le monde, les droits individuels et les libertés d’expression de la communauté académique sont attaqués. 

Au-delà du champ de l’ESR, c’est celui de l’Éducation nationale qui se trouve désormais attaqué (voir ici la lettre de la FSU adressée sur le sujet au Président de la République) : nombre de supports pédagogiques ainsi que des pans entiers des programmes scolaires (égalité filles-garçons, lutte contre les discriminations, etc.) sont à présent stigmatisés comme porteurs d’une idéologie néfaste y compris par l’institution. L’indépendance de la recherche, de l’enseignement et la libre expression sont des droits fondamentaux. Le SNESUP-FSU rappelle son opposition à la généralisation des évaluations à distance sous forme de visio-conférence et à la constitution de “panels d’experts resserrés” annoncée par l’HCERES. Il réaffirme son attachement à l’évaluation par les pairs et à la tenue des visites sur site qui constituent à ce jour un moment structurant de la vie des unités de recherche et plus largement des établissements. La collégialité et le rapport aux pairs, ainsi que la stabilité des emplois assurée par le recrutement de personnels statutaires titulaires, en sont les garants. Il en va de l’avenir du service public de l’ESR.