Décharge syndicale et heures complémentaires

Publié le : 28/04/2021

Décharge d'activité de service à titre syndical et heures complémentaires

 

Ph. Enclos

SNESUP

20 mai 2011 mise à jour 28 avril 2021

 

 

Les services administratifs des EPCSCP refusent parfois de rémunérer des services d’enseignement complémentaires assurés par des enseignants bénéficiant d’une décharge d’activité de service (DAS) à titre syndical, au motif que, du fait de cette dernière, ils n’accomplissent pas l’intégralité de leur service statutaire.

 

Certes, l’article 7, I, 2° du décret n° 84-431 du 6 juin 1984 modifié édicte :

« Lorsqu'ils accomplissent des enseignements complémentaires au-delà de leur temps de travail tel qu'il est défini au présent article, les enseignants-chercheurs perçoivent une rémunération complémentaire dans les conditions prévues par décret. », ce qui implique que des heures complémentaires ne peuvent donner lieu à rémunération qu’après que le service statutaire a été intégralement effectué.

Certes encore, il n’existe aucune disposition législative ou réglementaire indiquant que les fonctionnaires bénéficiant d’une DAS peuvent être rémunérés pour des services complémentaires.

 

Toutefois, de tels refus sont manifestement illégaux.

 

Pris en application des articles 13 et 21 de la Constitution française et de l'ordonnance du 4 février 1959 relative au statut général des fonctionnaires, le décret n° 82-447 du 28 mai 1982 édicte les modalités d'exercice du droit syndical dans la fonction publique.

Ses articles 16 à 19 instaurent un système de DAS au bénéfice des représentants syndicaux, attribuées par le ministère et délivrées aux organisations syndicales représentatives, à charge pour elles de désigner librement parmi leurs membres les bénéficiaires de ces DAS, dont elles communiquent la liste au ministre. Ce dernier adresse ensuite les notifications individuelles aux recteurs, lesquels les transmettent aux présidents des établissements où sont affectés les bénéficiaires.

 

En refusant de rémunérer des services d’enseignement complémentaires au motif que, du fait du bénéfice de cette DAS, les intéressés n’effectuent pas l’intégralité de leur service statutaire, les présidents des établissements considèrent implicitement que la DAS ne s’impute pas sur ledit service.

Cette interprétation est manifestement contraire au principe même des décharges d’activité de service à titre syndical, qui a pour finalité de permettre aux responsables syndicaux d’exercer leurs activités syndicales pendant une partie de leur temps de travail, à l’instar du système des « heures de délégation » instituées par le code du travail à destination des salariés sous statut de droit privé. Selon ce principe, le temps correspondant aux DAS doit être assimilé à du service fait : le service est réputé fait. Par voie de conséquence, il est contraire audit principe de considérer qu’un enseignant-chercheur bénéficiaire d’une DAS se trouve de ce fait en « sous-service ».

 

Cette analyse a, d’ailleurs, été exposée par le ministre en charge de la fonction publique lui-même dans une circulaire du 18 novembre 1982 relative à l'application du décret n° 82-447 du 28 mai 1982 relatif à l'exercice du droit syndical dans la fonction publique (JO Lois et décrets du 09 février 1983, page 1593), puis dans sa circulaire du 3 juillet 2014 relative au même objet :

« Les décharges d'activité de service peuvent être définies comme étant l'autorisation donnée à un agent public d'exercer, pendant ses heures de service, une activité syndicale au lieu et place de son activité administrative. […] Les décharges d'activité de service ne modifient pas la situation statutaire des fonctionnaires concernés. Ceux-ci demeurent en position d'activité dans leur corps et continuent à bénéficier de toutes les dispositions concernant cette position. »

 

Par analogie avec le régime juridique des « heures de délégation » octroyées par le code du travail aux salariés de droit privé, lorsque l’autorité administrative considère que le temps dédié à une DAS a été frauduleusement détourné de son objet par son titulaire, elle serait fondée à refuser de mettre en paiement le salaire correspondant (évidemment, l’administration s’expose alors, en cas de recours en annulation, à devoir apporter la démonstration de la fraude devant le juge administratif).

Il s’en déduit que l’intégralité du salaire est due dès lors qu’il n’est pas contesté que la DAS a été utilisée conformément à son objet, et, par voie de conséquence, que le service doit être réputé fait, ce qui autorise l’intéressé à effectuer des heures complémentaires rémunérées.

 

Cette analyse vaut également pour la délivrance d’autorisations de cumul.