Déclaration de Boycott du CTU du 21 juin 2021 consacré aux "chaires de professeurs junior"

Publié le : 21/06/2021

 

 

Déclaration de boycott des organisations syndicales représentées au CTU
du 21 juin 2021 consacré aux "chaires de professeur junior"

 

Paris, le 21 Juin 2021

Le 21 juin 2021, le Comité technique des personnels enseignants titulaires et stagiaires de statut universitaire (CTU)est convoqué notamment pour une présentation du projet de décret portant création des contrats de « chaire de professeur junior ».

Les organisations syndicales signataires de ce communiqué opposées à ce dispositif ont décidé de le boycotter. Elles reprennent la déclaration des organisations syndicales du CTMSER à ce sujet et y apportent quelques éclairages propres aux personnels enseignants titulaires et stagiaires de statut universitaire.

Elles tiennent par cet acte à dénoncer publiquement :

D’une part, les conditions de travail insoutenables, au niveau du rythme entre les différentes réunions de présentations des projets de décrets de la loi de programmation de la recherche. Les réunions s’enchaînent telle une course poursuite en vue de comités techniques qui déferlent sur le mois de juin. Cette précipitation ne permet pas à la démocratie sociale de s'exercer : les membres du CTU sont dans l'impossibilité de se tourner vers leurs pairs entre la communication des projets de textes par le ministère et leur examen en séance.

D’autre part, ce projet de décret sur les chaires de professeurs juniors « donnant vocation à accéder à l’emploi titulaire en qualité de professeur des universités ou assimilé, (CPJ ou « tenure tracks »), est rejeté par la majorité de la communauté universitaire et des organisations syndicales représentatives. 

Cette procédure contourne les instances normales de recrutement des fonctionnaires, en créant une voie parallèle de recrutement « hors statut ». Un chercheur ou une chercheuse en CPJ serait contractuel-le pendant trois à six ans, avant de passer directement professeur ou professeure des universités ou directeur ou directrice de recherche : la titularisation en rang A via la précarité, ou la porte.

Quel progrès statutaire ! 

Plus encore, la condition de diplôme, en l'occurrence l'obtention de l'habilitation à diriger des recherches, n’est pas requise. La titularisation serait conditionnée à la satisfaction d’objectifs fixés dans une « convention » en termes de publications, valorisation, réponses à appels à projet, et avec des obligations d'enseignement dérisoires (64h TD), sans responsabilité pédagogique … Le ministère introduit pour les CPJ des obligations de résultats en matière de recherche ! Une telle obligation de l'obtention de résultats, n'est pas seulement une absurdité en ce sens qu'il est impossible de prévoir l'issue d'une réelle aventure scientifique, mais traduit une méconnaissance dangereuse de ce qu'est la recherche en confondant ce qu'elle sous-tend avec ce qu'elle implique. Par ailleurs, à l'évaluation par les pairs des résultats des CPJ se substitue une commission ad hoc de membres nommés par "l'autorité compétente". Ces CPJ n'auront donc ni les mêmes conditions de recrutement, ni les mêmes obligations de service, ni les mêmes moyens pour assurer leur recherche, ni les mêmes dispositifs d'évaluation que leurs collègues, maîtres de conférences, désireux de devenir professeurs des universités. Cette voie de recrutement supplémentaire s'effectuera avec un effectif constant de professeurs d'université et donc au détriment de la voie par concours. Cette « innovation », tout comme le CDI de mission scientifique, est une violente attaque contre les statuts du personnel, accroîtra la concurrence entre eux.

Dans un pays où le recrutement des chercheurs chercheuses, enseignantes-chercheuses et enseignants- chercheurs est fait sous statut, recrutement envié internationalement, le modèle prévu dans le cadre des « chaires juniors » piétine les libertés académiques. Le modèle prévu est celui de la précarisation des débuts de carrières, à l’instar du modèle allemand qui est mis en avant par le ministère malgré ses conséquences néfastes pour le personnel et la recherche.

La logique qui prévaut dans ce décret repose sur le recrutement sur projet de recherche, alors que la logique de recrutement sur statut décorrèle le grade et l’emploi et garantit par là-même l’indépendance de la recherche.

Le décret s’évertue à essayer de concilier deux logiques irréconciliables car diamétralement opposées.

Enfin, il est inadmissible que ce texte, qui crée une nouvelle voie d’accès au corps des professeurs d’université régi par le décret de 1984, ne soit pas soumis pour avis au CTU, qui a une compétence exclusive sur les décisions statutaires concernant les personnels régis par ce décret

Les syndicats signataires, en boycottant ce comité technique, marquent leur profond désaccord avec la mise en œuvre d’une procédure actant la déconstruction des recrutements sur statut et par là même fragilisant le statut de fonctionnaire et les libertés académiques et de recherche.

Signataires : FERC CGT, SGEN CFDT, SNESUP-FSU, SUD Éducation