La lettre aux retraité·es n° 134 - novembre 2023

Publié le 30 novembre 2023

Les politiques affaiblissants et privatisant le système public de santé se succèdent en continu et le Projet de Loi de Financement de la Sécurité Sociale 2024 en est le plus récent exemple.

Dans cette Lettre, vous pourrez lire la première partie d’un « dossier santé », avec au sommaire :

  • Sécurité sociale : son histoire depuis sa création jusqu’à aujourd’hui.
  • Analyse du PLFSS 2024 : austérité, réduction des remboursements, rationnement.
  • Le décret Protection Sociale Complémentaire dans la Fonction Publique : contenu et impact sur toutes et tous y compris les retraité.es.

Dans une prochaine Lettre, la deuxième partie traitera des médicaments, de la formation des soignant.es, des problématiques de la dépendance, de l’aide et des aidant.es.

Une brève histoire de la sécurité sociale

Jacques Haiech


 

La Sécurité sociale, pilier du modèle social français, incarne les principes de solidarité et d'universalité depuis sa création à la fin de la Seconde Guerre mondiale. Clin d'œil à la vision de la santé de l'OMS, elle aspire à un bien-être physique, mental et social complet pour tous. Conçue dans les décombres du conflit mondial, elle a été établie sur des bases de gestion démocratique voulues par Ambroise Croizat, incarnant l'ambition sociale d'une couverture solidaire généralisée.

L'évolution de la Sécurité sociale reflète les métamorphoses de la société française. Les ordonnances de 1967 marquent un premier pas vers une gestion paritaire, qui ouvre la voie à une influence croissante du patronat. Un tournant majeur survient avec la loi du gouvernement Rocard en 1990, introduisant la CSG, modifiant radicalement le financement en le rendant plus proche de la fiscalité et moins dépendant du travail. La loi de 1996, quant à elle, introduit un budget de la Sécurité sociale voté par le Parlement, consolidant l'interventionnisme de l'État et préparant le terrain pour une politique d'austérité qui s'affirmera ultérieurement.

Aujourd'hui, la Sécurité sociale se trouve à un carrefour financier et éthique. Le projet de loi de finance pour 2024 présente un excédent budgétaire grâce à l'amortissement de la dette sociale. Cependant, cela masque une réalité plus préoccupante : les recettes de la Sécurité sociale sont affectées par des décisions étatiques, comme la modification des barèmes des cotisations sociales, sans compensations adéquates. Une logique d'austérité semble s'installer, interrogeant la pérennité des principes de mutualisation des risques et de solidarité.

Pour un retour aux fondements de 1945, un changement de cap s'impose. Il faudrait renforcer la gestion démocratique et la participation des salariés, revaloriser les cotisations sociales plutôt que de recourir à la fiscalisation et reconnaître la valeur du travail au-delà du marché. Ainsi, face aux enjeux actuels, la Sécurité sociale réclame une relecture de ses missions et de son financement, centrées sur le droit à la santé et la justice sociale, au cœur du pacte républicain.