Motion d'orientation École émancipée-Pour un syndicalisme offensif - Congrès d'orientation 2023
Motion EE-PSO
L’Université émancipée
L’université est percluse de rapports de domination – ceux qui traversent toute la société (genre, race,…), mais aussi spécifiques au fonctionnement de l’ESR : entre disciplines, entre personnels et étudiant·es, entre enseignant·es et le reste du personnel, entre titulaires et précaires, et entre les différents corps assurant les mêmes fonctions.
Nous pensons que le rôle de notre syndicat, au-delà de la défense individuelle et collective des collègues, est de faire tomber ces rapports de domination et de construire une université émancipée et émancipatrice. Ni retour en arrière, ni soumission aux réformes néo-libérales, une université sans marché ni mandarinat.
L’Université, lieu protégé du pouvoir politique ?
L’université n’est plus un lieu autonome, protégé du pouvoir politique. Elle ne l’est plus en fait, dès lors qu’un ministre intervient dans un « colloque » sur l’islamo-gauchisme ou qu’un président fait mine d’ignorer la prévisibilité des catastrophes climatiques. Elle ne l’est plus en droit, puisque le pouvoir politique multiplie les statuts expérimentaux et dérogatoires, pour les établissements (EPEX) comme pour les personnels, des « expérimentations » bien moins protectrices que les statuts originaux. Elle ne l’est plus ni en fait ni en droit avec la multiplication des interventions policières sur les campus qui font bien peu de cas des franchises universitaires.
Nous devons ré-affirmer notre rôle créateur de savoir émancipateur, en autonomie du pouvoir politique. Ceci passe en premier lieu par de meilleures conditions de travail, mais aussi par la destruction de tout ce qui empêche le collectif de fonctionner, en particulier la perpétuation des rapports de domination qui prévalent déjà dans la société et sur lesquels s’appuient les attaques néolibérales. Nous devons ainsi continuer à dénoncer les financements sur projet, qui sont un outil de mandarinat et de précarisation, et lutter pour le rétablissement de financement pérennes et la création de postes de titulaires.
L’appropriation du travail des subalternes, les violences sexistes et sexuelles, les discriminations racistes, n’ont pas attendu les financements sur projet. Cependant, elles s’en trouvent renforcées, parce que la précarité d’une part et le mandarinat de l’autre exacerbent les situations de vulnérabilité.
L’ensemble de la société, et la jeunesse encore bien plus, sont confrontés aux enjeux de la rupture écologique qui remettent fondamentalement en cause le système capitaliste.
Par notre activité de création de savoir, nous avons le devoir de porter aussi des luttes pour les enjeux climatiques et d’être des partenaires des mouvements sociaux et écologistes.
Nous devons continuer à porter le mandat du SNESUP-FSU pour un véritable statut de l’enseignant élu dans les instances de l’établissement, qui permettrait de redonner du sens à l’engagement dans la vie de l’université et constituerait un véritable contre-pouvoir face au ministère et aux présidences
Lutter contre la précarisation et permettre aux précaires de lutter
Si les Assises de la précarité organisées en mars 2022, sous l’impulsion des camarades ÉÉ-PSO, ont participé à donner la parole aux personnels non titulaires, aux étudiant.es salarié.es, la lutte contre la précarité et la maltraitance de l’institution n’en est qu’à ses débuts. Notre engagement auprès de ces collègues et des étudiant.es doit se renforcer afin de leur permettre de se joindre à la lutte et que leurs droits soient respectés.
Un seul corps d’enseignant·es
Les dispositifs tirés de la LPR, comme le repyramidage et les primes réservées aux EC, ont montré un système pyramidal (des professeurs des universités aux enseignants de statut premier ou second degré) à bout de souffle. Il faut remettre à l’ordre du jour la revendication ancienne du syndicalisme de l’enseignement, celle d’un « corps unique », de la maternelle à l’université. Tou·tes les enseignant·es et chercheur·ses qui participent à la production et à la transmission de connaissances doivent disposer des mêmes garanties statutaires.
Il faut également définir positivement la liberté académique en toutes ses composantes (franchises universitaires, recrutement par les pair·es, majorité nette dans les conseils des établissements) et les étendre au-delà du périmètre des seul·es professeur·es des universités à toutes les fonctions de recherche et d’enseignement.
Il faut enfin repenser l’ensemble de la gestion des carrières, de manière à laisser le moins de prise aux rapports de pouvoir et à favoriser l’émergence de collectifs de travail. Au-delà des enjeux de démocratie au travail. Traiter les questions à l’échelle du groupe et non de l’individu, permet de mener une politique ambitieuse d’égalité salariale, tout à l’inverse des mascarades autour du RIPEC et du repyramidage.
Une attention particulière doit être portée à l’entrée en carrière en recherche. Survit encore aujourd’hui la vision du doctorat comme une relation exclusive « maître-élève », qui doit être dépassée en une relation d’accueil d’un nouveau membre dans et par un groupe. Ainsi, la direction collégiale doit-elle être systématisée.
Auto-organisation des luttes
Nous vivons une situation paradoxale dans le mouvement social : un mouvement extrêmement massif qui n’a connu aucun débordement pendant les deux premiers mois de mobilisation. C’est depuis le passage en force par le 49.3 que ce mouvement déborde, porté par une colère immense. Cette colère est l’occasion de rebâtir des liens collectifs et de politiser nos lieux de travail. Nous devons nous appuyer sur ce mouvement de masse pour faire émerger les luttes spécifiques à l’Université et l’enseignement supérieur et la recherche, qui suffiraient à elles seules à bloquer nos campus : précarité enseignante et étudiante, manque de postes et de moyens, système de bourse à bout de souffle, étudiant·es dépendant de l’aide alimentaire, tri social à l’entrée en licence et maintenant en Master, méthodes pédagogiques et enseignement à distance imposés…
Le SNESUP doit mettre toutes ses forces militantes à construire, avec toute autre organisation partageant ses buts et ses valeurs, de nouvelles luttes émergeant du mouvement contre la réforme des retraites afin d’obtenir des victoires pour d’autres revendications (salaires, statut, précarité, service public…).
Premier·es signataires : P.-H. Ardonceau (Pau), G. Bekhtari (Paris), P.-E. Berche (Rouen), C. Bornais (Lille), J.-M. Canu (Rouen/Bordeaux), V. Charbonnier (Nantes), S. Czajkowski (Bordeaux), M. David (Nantes), P. Enclos (Lille), F. Gallot (Créteil), V. Gay (Paris), J. Haiech (Strasbourg/Paris), H. Harari-Kermadec (Orléans), N. Lebrun (Lille), F. Leconte (Rouen), Y. Leredde (Montpellier), P. Maillard (Strasbourg), J. Malifaud (Paris), L. Maurel (Dijon), N. Gregori (Nancy), L. Pellisier (Créteil), T. Sami (Nantes), D. Sidobre (Toulouse), R. Taourit (St Denis), C. Vernicos (Montpellier)
Pour signer cette motion : er.ee-pso@vertumne.fr
D’autres propositions de la tendance EE-PSO ne pouvant figurer dans ce texte faute de place sont disponibles en ligne ici : https://eepso.wordpress.com/