Nouvelle formation des enseignants post concours : le grand bricolage ! Communiqué de presse du SNESUP-FSU du 8 juillet 2022

Publié le : 08/07/2022
 
Avec sa “réforme” de la formation, le ministère de l’Éducation Nationale fait le pari que, en elle-même, la réussite au concours suffit pour qu'un·e lauréat·e prenne des classes en pleine responsabilité, seul·e, dès la rentrée. Y compris celles et ceux qui ne sont pas titulaires d'un master MEEF et n'ont le plus souvent jamais vu de classes autres que celles où ils ou elles ont été élèves : à mi-temps en responsabilité de classe(s) dès le 1er septembre, ils et elles bénéficieront la même année d’un mi-temps de formation (entre 220 h à 250 h) et d’un accompagnement... à “ajuster” localement.
 
Le cadrage de la formation mi-temps, produit par le Réseau des INSPÉ et France université, sans concertation, coche toutes les cases des injonctions ministérielles. On peut douter qu'il permette une entrée dans le métier réellement progressive.
 
De plus, ce mi-temps de formation, notoirement insuffisant, variera d'une académie à l'autre. Faute de moyens financiers et humains, sa mise en œuvre fait d’ores et déjà l'objet de divers adaptations et contournements : heures maquette "en autonomie", réduction du nombre de visites (une par an), mutualisation des cours avec les étudiant·es de master (qui, elles et eux, n’ont pas le concours), économie sur la formation des étudiant·es de master, etc. Selon l’état des ressources locales - qui sont insuffisantes partout (comme l'a montré le CNESER INSPÉ du 7 juillet) - on trouve des aménagements : soit les directions réduisent la formation, soit les formateurs et formatrices croulent sous les heures supplémentaires, dont la plupart du temps ils ne veulent pas. Parce qu’évidemment, aucun INSPÉ n'envisage de véritablement créer des postes de titulaires à hauteur des besoins.
 
Concrètement, un ou une PE aura, pour apprendre à enseigner le français, de la maternelle au CM2, de 18 h à 30 h de formation. Autre exemple : peut-on croire que des "professionnel·les" lauréat·es du CAPLP – titulaires d’un bac+2, d’un Bac professionnel voire d’un Brevet professionnel – puissent être correctement formé·es à enseigner de la SEGPA au BTS avec 130 h de formation et 100 h de “travail personnel autonome” ? De façon plus générale, comment justifier que la production d’un "port-folio" soit mise sur le même plan que la rédaction d’un mémoire, alors que les contenus ne font pas l’objet du même type de travail et de validation ?
 
Pour ce qui est de la seule organisation : comment préparer la rentrée alors que la circulaire sur les stagiaires n'est toujours pas publiée à la date du 8 juillet et que la proportion de stagiaires à temps plein et à mi-temps dans le 2d degré n’est pas encore connue partout, ce qui impacte évidemment la composition des groupes.
 
Les conditions pour accueillir convenablement ces nouveaux et nouvelles enseignant·es ne sont pas réunies. Dans le même temps, des responsables de formation et des directions démissionnent, le sentiment de perte de sens du métier s'amplifie, la crise de recrutement des enseignant·es s’aggrave et le Comité de suivi des INSPÉ a déjà pris fin. Qui donc regardera ce qui va se passer l'année prochaine et sera en mesure de faire entendre la voix des personnels.
 
Pour les fonctionnaires stagiaires nous demandons :
  • une entrée vraiment progressive dans le métier : pas de responsabilité seul·e en classe dès le début de l'année ;
  • une année de stage pensée comme une année de formation, ce qui présuppose des ambitions scientifiques en termes de contenus et ne saurait se confondre avec un affichage horaire de thématiques génériques ;
  • du temps et des moyens dans les INSPÉ pour la formation et l'accompagnement.
C’est à ce prix, et en revalorisant les salaires, qu’on pourra espérer attirer davantage de candidats et candidates vers les métiers de l’enseignement. Les élèves méritent des professeur·es formé·es, pas des "faisant-fonction", recruté·es comme contractuel les en moins de 30 minutes.■