Touche pas à mon CNESER disciplinaire ! - Lettre flash N° 61

Documents joints : 
Publié le : 12/06/2019

 

 

La presse attire régulièrement notre attention sur des « affaires » de harcèlement mettant en cause des personnels de l’ESR. Le droit disciplinaire est dans ce cas mis en œuvre par des institutions spécifiques : les sections disciplinaires des établissements et, en appel, le Conseil national de l'enseignement supérieur et de la recherche statuant en matière disciplinaire (CNESER disciplinaire) dont nous sommes amené·es à renouveler les membres élu·es ce 13 juin.

Le SNESUP-FSU est attaché à l’existence de cette juridiction administrative et au principe d’un jugement par les pairs. Bien qu’il ne soit pas composé de magistrat·es professionnel·les, le CNESER n’a jamais démérité dans l’exercice de ses prérogatives. Bien au contraire, sur les 31 décisions rendues par le CNESER en 2016, tous motifs confondus, « seules 8 ont fait l’objet d’un pourvoi en cassation devant le Conseil d’État, aboutissant à 5 cassations effectives et 3 confirmations » ; quant aux 9 décisions rendues en 2017, « 2 ont fait l’objet d’une cassation, 1 a été confirmée et 6 sont toujours en cours d’instruction » [https://miniurl.be/r-2ei5].

Sans sacrifier à la mode des « lois de circonstance », le SNESUP-FSU souhaite améliorer le fonctionnement de cette justice indépendante. Le travail de grande qualité du CNESER trouve en effet ses limites dans la faiblesse des moyens attribués pour le faire fonctionner. Actuellement, les juges rédigent des rapports et siègent sans aucune décharge accordée par le ministère.

D’autres améliorations sont aujourd’hui nécessaires pour garantir la sérénité des procédures disciplinaires : respect des procédures disciplinaires en première instance, possibilité d’assistance et de protection des victimes (statut de témoin assisté), dépaysement plus fréquent en première instance, capacité d'auto-saisine du CNESER disciplinaire. De plus, il n’est pas acceptable que la Ministre puisse intervenir dans la procédure en saisissant le Conseil d’État avant même que le CNESER disciplinaire ne puisse juger en appel sur le fond. Le SNESUP-FSU préconise également d’augmenter les moyens des dispositifs de prévention du harcèlement : plan égalité, cellule d'écoute, etc. Il demande au ministère de veiller à leur création effective dans l’ensemble des établissements.                                                                                                                                                                       

La Loi LRU a renforcé en 2007 les pouvoirs des président·es d’université en leur donnant « autorité sur l’ensemble des personnels de l’université ». Pour assurer le respect du principe constitutionnel d’indépendance des enseignant·es-chercheur·es, il est donc plus que jamais nécessaire que le pouvoir de sanction disciplinaire relève toujours de juridictions spécialisées, indépendantes et souveraines. Le CNESER disciplinaire est une garantie offerte à chaque enseignant·e-chercheur·e et enseignant·e de voir son dossier examiné en toute sérénité, par des pairs, indépendamment d’une part du pouvoir local détenu par le chef d’établissement et d’autre part du ministère et du gouvernement. Le SNESUP-FSU souhaite dans tous les cas qu’il reste présidé par un·e enseignant·e-chercheur·e élu·e par ses pairs et il s’oppose par avance à toute réforme qui tendrait à̀ y imposer en lieu et place un·e magistrat·e extérieur·e. À l’heure où il est question défendre l’indépendance et de revaloriser la fonction et les missions des enseignant·es-chercheur·es, il serait malvenu de les dessaisir de cette compétence.