Lettre FDE février 2014

Publié le : 28/02/2014

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 Travaux du comité de suivi de la FDE : du suivi au cadrage ?

Après une séance de mise en place (nov. 13) et une séance de « remise à niveau » sur les textes (déc. 13), le comité de suivi aborde les questions de fond et cherche à formuler des préconisations pour les équipes de direction, de manière à faciliter la rentrée 2014.

Les échanges qui ont eu lieu jusqu'à maintenant ont mis en évidence des points d'alerte : place du concours, charge excessive de travail pour les étudiants sur l'année de M2, nécessité de formation et décharge des tuteurs, souci de l'équité territoriale, difficulté à faire fonctionner des équipes pluricatégorielles, écarts très importants entre les principes et la réalité de ce que vivent les personnels et étudiants dans les ESPE...
Deux questions d'actualité qui seront à l'ordre du jour de la prochaine séance :
L'alternance : les spécificités de l'alternance en FDE n'ont pas été clairement identifiées. Or, responsabilité totale de l'étudiant seul dans sa classe, support intégré dans le plafond d'emploi, un employeur unique ou presque, pas de décharge pour les tuteurs censés l'accompagner et qui eux-mêmes sont dans leurs propres classes (éventuellement dans un autre établissement), absence de formation continue... Est-ce un modèle défendable ? Parle-t-on de formation ?
Le mémoire de master : des oppositions fortes sont apparues sur la nature et les attendus du mémoire M2 MEEF - concernant la prise en compte de la dimension « recherche », la constitution des jurys, la confusion entre mémoire et rapport de stage, l'ambiguïté entre validation d'UE de master et titularisation...
Où l'on voit que ces deux questions (parmi d'autres !) n'ont pas été traitées en amont de la mise en place des ESPE ! Dans quelle mesure ce comité (dit « de suivi ») ira-t-il au-delà du constat vers la formulation des éléments de cadrage attendus ?
Prochaine séance prévue le 20 mars. Les personnels et usagers doivent se faire entendre ! Vous pouvez contribuer et nous aider à avoir une vision globale de la réalité des ESPE en vous adressant à fde@snesup.fr.
voir http://www.education.gouv.fr/cid75398/installation-du-comite-de-suivi-de...
Le comité de suivi, présidé par Daniel Filâtre, recteur de l'académie de Grenoble, sera un lieu d'analyse,
d'évaluation, de concertation et de propositions sur la réforme de la formation des enseignants.

Parité affichée, discrimination au sommet ?

Les ESPE connaissent des débuts difficiles à plus d'un titre : conditions de formation contestées par les étudiants du fait de la lourdeur des objectifs cumulés (formation de master, préparation de concours, stages en Master 1 et pour la rentrée prochaine en Master 2 la perspective d'un stage en responsabilité à mi-temps en M2 à assumer en plus de la validation des Unités d'enseignement du master et de la réussite de l'examen de qualification professionnelle permettant la titularisation...), conditions de travail dénoncées par les enseignants (réduction des moyens, postes ou heures d'enseignement et effectifs en hausse...) mais encore mise en place d'un pilotage des plus bureaucratiques où les décisions qui les concernent échappent aux enseignants pourtant membres d'une composante universitaire ESPE (8 sièges dans un Conseil d'Ecole de 30 membres).

Parité, égalité, exemplarité.... de belles valeurs affichées !


Il est une valeur qui a fait l'objet d'une grande campagne de communication, celle de la parité ! Il faut dire que les temps s'y prêtaient :

En janvier 2013, Geneviève Fioraso s'était exprimée à l'occasion de la signature de la Charte pour l'égalité Femmes/Hommes, élaborée et ratifiée par la CPU, la CDEFI et la CGE1, en présence de Najat Vallaud-Belkacem, ministre des Droits des femmes, porte-parole du Gouvernement. «La loi ne doit ni ne peut tout régler. Mais il ne faut pas craindre d'y recourir, pour institutionnaliser certaines bonnes pratiques, lorsqu'on a vainement attendu leur émergence spontanée et que l'on a même constaté leur détérioration. (...) Nous ne pouvons pas prétendre éclairer, élever le niveau de formation de notre jeunesse, progresser dans la connaissance et sa diffusion, sans être nous-mêmes exemplaires sur une question aussi déterminante que la parité homme - femme. C'est un enjeu pressant, évident, de justice et d'efficacité.»2
2

1 CPU : Conférence des Présidents d'Université, CDEFI : Conférence des Directeurs des Ecoles Françaises d'Ingénieurs, CGE : Conférence des Grandes Ecoles
2. Discours de G. Fioraso lors de la signature de la Charte pour l'Egalité Femmes / Hommes le 29.01. 2013 http://www.enseignementsup-recherche.gouv.fr/cid66964/signature-de-la-ch...


La Convention interministérielle pour l'égalité entre les filles et les garçons, les femmes et les hommes, dans le système éducatif1 2013-2018 a été signée le 7 février 2013 préconisant plusieurs actions dont :
Mesure 12 : Intégrer la déconstruction des stéréotypes sexistes et l'égalité entre les femmes et les hommes dans le cahier des charges de la formation initiale des personnels enseignants du premier degré et du second degré, d'éducation, et d'orientation et dans les cursus de formation des enseignants de tous les ministères signataires.
Mesure 13 : (...) Les personnels de direction et de ressources humaines de l'enseignement supérieur se verront proposer des formations à l'égalité entre les femmes et les hommes ; en s'appuyant sur la Charte pour l'égalité femmes/hommes, élaborée et ratifiée par la Conférence des présidents d'universités (CPU), celles des directeurs d'écoles d'ingénieurs (CDEFI) et des grandes écoles (CGE), l'ensemble des établissements d'enseignement supérieur mettra en place des actions de formation au genre et à l'égalité entre les femmes et les hommes.

De fait, alors qu'en 2008 presque 20% des universités étaient présidées par des femmes (ce qui était un record historique), les élections de 2012 ont vu le nombre de présidentes divisé par deux2. La loi Fioraso de juillet 2013 a imposé la parité dans les modes de scrutin des élections des universités et communautés. "Chaque liste de candidats est composée alternativement d'un candidat de chaque sexe". Les règles ont été appliquées pour les instances des ESPE.

1. http://femmes.gouv.fr/wp-content/uploads/2013/02/20130207-egalite_filles_gar%C3%A7ons.pdf
2. Chiffres clés de la parité dans l'enseignement supérieur et la recherche, http://cache.media.enseignementsup-recherche.gouv.fr/file/Charte_egalite_femmes_hommes/90/6/Ch

 

 

Des intentions et des valeurs prônées... aux actes !

L'une des recommandations des Chartes pour l'Egalité étant la production de statistiques sexuées, regardons un peu en prenant l'exemple d'une ESPE, celle de l'académie de Nantes, quant à la volonté de promouvoir la parité.

Le contexte :

L'ESPE de l'académie de Nantes :

259 personnels à temps complet : 142 femmes, 117 hommes.
Les femmes sont plus nombreuses dans les catégories BIATSS.

Côté enseignants : parité presque parfaite
73 femmes dont 19 Enseignantes chercheuses (17 MC et 2 PU)
74 hommes dont 16 Enseignants chercheurs (tous MC).

La place des femmes dans les fonctions de responsabilité à l'ESPE de l'Académie de Nantes

Les instances des ESPE ont donc été constituées avec une parité stricte : collèges de 2 noms respectant chacun l'alternance de candidats Homme / Femme. Au terme du processus : pour le Conseil d'Ecole de l'ESPE sont élus 4 femmes et 4 hommes représentant les personnels enseignants. Dans le Conseil d'Ecole de l'IUFM qui existait jusqu'alors, siégeaient 11 élus représentant les enseignants dont 7 femmes et 4 hommes.


Ce processus terminé, les inégalités d'accès aux responsabilités peuvent reprendre tranquillement :
Le choix d'une personne pour la direction de l'ESPE s'est porté sur un candidat homme,
Le choix d'une personne pour la Présidence du Conseil d'Ecole s'est porté sur un candidat homme,
L'organigramme1 publié pour la direction de l'ESPE nouvellement mise en place fait apparaître :
- 4 hommes directeurs - adjoints
- 5 hommes responsables de site.

Résultat de la parité à la direction de l'ESPE : 100 % Hommes 0 % Femme !

Il se pourrait que l'ESPE de Nantes soit un objet statistique atypique avec malheureusement des femmes nombreuses mais totalement incompétentes... mais pourtant elles sont aussi souvent, et même plus, responsables de parcours de master MEEF ou chargées de mission que leurs homologues masculins !

Il fut un temps pourtant où l'IUFM de Nantes avait une directrice (PU reconnue pour ses compétences par le monde universitaire) ; il fut un temps où l'IUFM de Nantes avec « une » directrice - adjointe (alibi peut-être ou pas !) ; il fut un temps où l'« un » des cinq sites de l'académie fût dirigé par une femme... ! Mais la parité « formelle », et parfois contre-productive par rapport à l'objectif, des nouvelles procédures semble avoir désinhibé toute tentation de concentration machiste des pouvoirs ! La parité a fait long feu !

http://www.espe.univ-nantes.fr/30240447/0/fiche___pagelibre/&RH=1222940566411&RF=1223456364786

 

Nantes et ailleurs ? Nantes serait-il un exemple isolé ? Pas si sûr...

La liste des directeurs -ices d'ESPE actuellement nommés fait apparaître sur 28 académies :
8 directrices d'ESPE pour 21 directeurs ! Combien de candidates classées en seconde position ?

La liste des Président-e-s de Conseil d'École actuellement nommés sur proposition des recteurs-ices :
4 Présidentes de Conseil d'Ecole, 20 Présidents sur les 24 personnes nommées à ce jour.

Et dans les ministères, quelle confiance accordée aux femmes ?
Composition du cabinet de Mme Fioraso1 : 14 membres : 10 hommes, 4 femmes
Composition du cabinet de M. Peillon2 :
Directeur, chef de cabinet, adjoints, conseillers (hors les conseillers techniques) : 8 membres : 7 hommes, 1 femme ; Conseillers techniques : 10 (5 hommes, 5 femmes).

Conclusion : Parité sur papier quant aux procédures, exclusion des femmes pour conclure ! Il convient de mettre en évidence, partout où cela est possible, ces mesures discriminatoires à l'encontre des femmes pour l'accès aux responsabilités... Il ne suffit pas de demander aux ESPE la création de modules de formation contre les stéréotypes, encore faut-il se les appliquer ! Question d'exemplarité !


1. http://www.enseignementsup-recherche.gouv.fr/cid60318/cabinet-de-la-ministre.html
2. http://www.education.gouv.fr/cid2534/les-membres-du-cabinet.html

 

 

Préparation au concours : ne pas se tromper de type de formation

Une nouvelle fois, les universités doivent mettre en place des « années de préparation » aux concours pour les étudiants déjà détenteurs d'un master (reçus-collés, détenteurs d'un master autre qu'un master MEEF...).
Le financement de ces formations est problématique : elles ne sont pas reconnues par le système de répartition des budgets entre établissements (système SYMPA). Dès lors, l'alternative est simple : les financer sur les fonds propres ou faire payer les étudiants. Dans le premier cas, les droits d'inscription sont ceux de la formation initiale, dont le montant est « fixé » par l'État.
Dans le second cas, on est sur les tarifs de formation continue dont le montant est libre, ou dans le cadre du Diplôme d'université (DU) qui est à la charge exclusive des étudiants
Dans tous les cas, les coûts réels sont minorés en raison de la mutualisation possible avec les cours des masters MEEF.
Si, dans les deux cas, les étudiants disposeront d'une carte (d'étudiant), ils ne pourront avoir le statut d'Emploi avenir professeur (EAP) pour lequel il faut être inscrit en L2, L3 ou M1. De plus, un étudiant doit être inscrit en formation initiale pour pour pouvoir être éligible pour une bourse de l'ESR, et la formation doit être habilitée à recevoir des étudiants boursiers. Dans le cas du DU, l'université doit donc faire une demande spécifique auprès du MESR.
Le dispositif « année de préparation au concours » est préférable au DU : dès que ces « années de préparation » seront reconnues par SYMPA (lequel n'est qu'un système de répartition de la pénurie), les frais d'inscription seront ceux des formations initiales. Quel que soit le cas, année de préparation au concours ou DU, il faudra se battre au niveau local pour que nos étudiants ne payent que des droits de formation initiale.
Enfin, il ne faut pas oublier qu'il n'y a aucun sens à délivrer un diplôme même local pour sanctionner une année de préparation au concours, sinon à dévaloriser un peu plus la notion même de diplôme.