Lettre FDE mai 2013

Publié le : 17/05/2013

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 Que se passe t-il ?

« Refondation » et formation des enseignants : le changement de réforme, c'est maintenant.


Cet argumentaire a été adopté par la Commission Administrative du SNESUP, le 16 mai 2013

Le texte a pour objectif d'expliciter les motivations et les conditions du moratoire demandé par le SNESUP.
La réforme de la FDE est, depuis le début, mal engagée, en raison notamment d'un calendrier contraint avec une mise en œuvre au 1er septembre 2013, actuellement irréalisable dans des conditions satisfaisantes. Certains arbitrages ou décisions (absence de pré-recrutement, place du concours, gouvernance des ESPE, place du recteur, etc.) doivent être revus.

ESPE et accréditations : mise en place forcée

Les pré-projets d'accréditation ont été remontés fin février et selon les directives du MESR, les dossiers « définitifs » doivent être envoyés au ministère fin mai, en ayant été votés par les CA de toutes les universités du site, avec passage préalable devant les comités techniques (CT).
Ce dossier d'accréditation, selon le projet de loi, outre les éléments sur les ESPE, contiendrait aussi les dossiers d'habilitations des diplômes de master et l'accréditation emporterait habilitation des diplômes. Ces dossiers d'habilitation seraient allégés par rapport à l'existant puisqu'ils ne comprendraient plus les contenus pédagogiques. Le principe de l'accréditation anticiperait la future loi Fioraso, verrouillant ainsi tout débat sur le sujet.

Une construction collective empêchée

Selon le ministère de l'Éducation nationale (MEN) , la mise en place des ESPE est problématique dans un tiers des académies parmi lesquelles Bordeaux, Montpellier, Nancy, Nantes, Toulouse, Versailles, etc. [mais sans que l'on sache vraiment en quoi précisément].
La « construction » s'est faite autour des Groupes de pilotage académiques (GPA), centrés autour des recteurs, et dont les représentants des personnels ont été écartés. L'opacité est générale. Ainsi dans certaines académies le pré-projet d'accréditation n'a même pas été diffusé !
Autour de ces GPA, ont été mis en place des Groupes de travail (GT), comprenant les collègues, censés travailler sur les formations à partir de septembre 2013, hors année transitoire. Il s'agit donc essentiellement des masters, dont les maquettes devront être bouclées en moins de trois mois (1er mars-31 mai), passage dans les instances locales compris.

Des délais aussi courts ne sont évidemment pas propices au dialogue : le travail est souvent organisé en parallèle, sans échanges entre les différents groupes de travail et le temps contraint interdit toute velléité de réaction. Enfin, la situation d'une académie à l'autre est très hétérogène.

Un calendrier impossible

Après le 1er juin, le MESR a prévu de travailler en préparation du passage de la réforme devant les instances nationales (CNESER, CSE, etc.). Or, ce passage ne peut avoir lieu qu'après la publication de la loi. Les textes réglementaires associés (décrets et arrêtés) pourraient alors aussi passer devant les instances (dont le CNESER et le CSE). Afin « d'envoyer un signal fort » sur la formation des enseignants, et afin de pouvoir appliquer la « refondation » dès septembre 2013 , le choix du gouvernement a en effet été de travailler à droit constant. Autrement dit, il privilégie les circulaires, au détriment des arrêtés et décrets, pour simplifier la procédure de publication mais aussi éviter les débats.

Ces textes ainsi que le texte définitif de la loi seraient soumis aux instances entre juin et juillet (CNESER, CSE, CT, ...).  « Resterait » alors à chacune des universités à travailler à la création proprement dite des ESPE : passage dans les instances adéquates (dont les CA d'université qui ne pourront voter la création de l'ESPE qu'une fois la loi publiée). Il est donc fortement probable que certaines universités devraient rester ouvertes en août pour préparer la rentrée et que les personnels, notamment BIATOS, seront mobilisés pour cela.

De sérieuses inquiétudes

La construction des ESPE donne une image assez précise de leur futur fonctionnement : centré autour du recteur et des présidents d'université. Pour verrouiller la situation, statuts et règlements intérieurs pourront être adoptés sans les représentants1 des personnels et des usagers (en dehors de ceux élus dans les CA d'université).

Les règles de fonctionnement des masters prévoient la question des débouchés. Or ici, le seul débouché envisagé reste l'éducation nationale au détriment de tous les autres : autres ministères (agriculture, affaires étrangères, mer, défense, ...), enseignement privé ou enseignement en Europe. Les ESPE sont donc des écoles de l'éducation nationale et les masters MEEF risquent d'être rapidement considérés comme des sous-masters.
Maîtres d'ouvrage délégués, puis maîtres d'œuvre, les ESPE sont désormais considérées comme de simples opérateurs. Et le danger qu'elles se transforment en services communs d'université est désormais bien réel2.

Enfin, pour ne pas répéter les erreurs de 2010, il faudrait savoir comment se déroulera le processus d'inscription des étudiants et leur composante de rattachement. « Pas d'inquiétude » dit la DGESIP.

Formation des enseignants.

Le pilotage par les concours.

Un des principes initiaux de cette réforme était : la formation pilote les concours (de l'EN). Ce changement de paradigme marquait une rupture profonde.
Au 15 avril, beaucoup de groupes de travail sur les masters étaient à l'arrêt dans l'attente de la publication des maquettes de concours. Ils avaient le plus souvent travaillé sur la structure générale, les stages et l'initiation à la recherche, mais étaient bloqués sur les contenus.

La réalité de la Refondation en matière de FDE est donc toute autre que celle initialement annoncée : c'est le concours qui pilote la formation. Le master aura pour fonction, à terme, d'apprendre à passer les concours et à obtenir la titularisation.

La nouvelle mouture des maquettes, publiée à la mi-avril montre une simple inflexion de ce qui existait déjà pour le second degré et un zapping des disciplines pour le premier degré, bien loin des discours sur l'amélioration de la formation. Le gouvernement parlait de sa volonté d'une formation intégrée : la seule preuve en sera la présence obligatoire des 4 blocs « Filâtre »3 à chaque semestre, ajoutant encore des contraintes supplémentaires aux contraintes existantes.

Le choix initial de placer les concours en début du semestre deux a des conséquences importantes, en dehors même de la désorganisation du master et du caractère consécutif de la formation.

 

Des formations peau de chagrin

La comparaison avec 2002 est édifiante : l'équivalent d'une année de formation a disparu dans le cursus de formation des enseignants (par exemple l'année de PLC1 faisait couramment 750h, soit 100h de plus que le volume total de certains projets de masters) pour une formation voulue plus « professionnalisante ». De fait, les candidats seront moins bien formés dans leur discipline universitaire, mais aussi dans la ou les disciplines qu'ils devraient enseigner, et la partie professionnalisante est réduite à la portion plus que congrue. Quant à l'année de stage, elle se fera à mi-temps de l'Obligation réglementaire de service (ORS) devant les élèves.

La comparaison avec 2009 est tout aussi édifiante : pour un programme de concours plus fourni, les étudiants disposeront en moyenne de moitié moins d'heures pour le préparer... Ce n'est pas un facteur positif pour attirer à nouveau des candidats vers les concours dont l'ensemble des postes n'est pas pourvu.

Master

Les problèmes sont nombreux.

Discriminations : certaines universités envisagent la sélection à l'entrée du M1, d'autres à l'entrée du M2, etc.
Dans certaines académies, il est demandé de prévoir des parcours différenciés pour le M2, suivant que l'étudiant aura été lauréat du concours ou non.
Sans nouvelles du ministère à propos de la prise en compte, dans la dotation des universités, des années de préparation aux concours, des projets de Diplômes universitaires (DU) font à nouveau leur apparition. Ces préparations ont un coût, que ne veulent assumer ni le principal employeur (EN) ni le MESR. La seule solution technique trouvée est de créer un diplôme sans finalité (sous la forme d'un DU) qui permet de faire payer intégralement les étudiants. Comme pour une formation privée !

L'année de M2 sera en alternance pour les lauréats des concours EN. Mais le temps prévu en établissement ne laissera que très peu de temps pour suivre le master et préparer le mémoire : il suffit de se référer aux années de PE2 et PLC2 jusqu'en 2008. Au début des IUFM, les stagiaires effectuaient 4 à 6 h d'enseignement mais le mémoire était déjà le parent pauvre de la formation. Sans parler de l'initiation à la recherche...

Et en 2007-2008, les stagiaires effectuaient 9-11h ce qui leur prenait entre 4 jours et 4 jours et demi dans la semaine.

Personnels des universités

Bien que les personnels des universités, et notamment ceux des IUFM et de certaines UFR, sont chargés de la mise en œuvre de cette réforme, ils ont été pourtant systématiquement écartés par le ministère de l'Éducation nationale.

Depuis 2005 et la loi Fillon sur l'école, chaque année leur a infligé de nouvelles réformes : intégration, mastérisation, loi LRU, RCE, réforme du lycée, etc.
Cette réforme permanente, chronophage et génératrice de multiples réunions, est un obstacle à la réalisation de leurs missions (enseignement, recherche, etc.) et une source de stress, d'épuisement et de souffrances tant personnelles que professionnelles.

Dans certaines académies, le rectorat a demandé que 20 % des enseignants soient des professionnels, en précisant que ces collègues seront choisis parmi les rangs de l'EN. En creux, cette demande est une façon de dénigrer les enseignants des IUFM, précisément recrutés en raison du fait qu'ils étaient des professionnels. Les collègues l'ont d'ailleurs bien perçue comme telle et une fois de plus les IUFM sont désignés comme bouc-émissaire (voir aussi les propos de V. Peillon lors du déjeuner de presse du 30 avril)

Le CTMESR a voté à l'unanimité le vœu présenté par la FSU que soit proposé à l'ensemble des personnels des IUFM leur transfert vers les ESPE à la date de leur création.

Étudiants

Aucune avancée sociale dans cette réforme. Les pré-recrutements promis par le candidat Hollande se sont transformés en Emplois d'Avenir Professeurs (EAP).

Ces étudiants, notamment issus de milieux défavorisés, doivent être présents en moyenne 12 h par semaine dans leur établissement scolaire. Ce temps de travail, contrairement à la plupart des étudiants salariés, se loge pendant leur temps de cours universitaires. Mais en ce qui les concerne, le pire reste à venir : dans deux ans, les premiers EAP arriveront en master et vont découvrir qu'ils devront tout faire en même temps : suivre le master, exercer leur activité d'EAP (pratique accompagnée) et passer les concours !!!

La question des viviers est toujours aussi importante et ne se résout pas. Si l'on constate une légère augmentation du nombre d'inscriptions aux concours 2013, concours ouvert aux M1 et aux M24, il est probable qu'une partie significative des étudiants en L3 qui pourraient passer les concours EN préférera une autre orientation pour ne pas avoir à essuyer les plâtres d'une réforme confuse.

Contexte national

Il n'existe officiellement à l'heure actuelle aucune structure de suivi de cette réforme impliquant les représentants des personnels. Pourtant, cela fait maintenant dix mois que le comité suivi FDE a été promis par le gouvernement.

A priori, il n'existe pas de carte nationale de formation ou d'harmonisation entre sites. La formation professionnelle (PLP) ou technologique est laissée de côté. La place de l'agrégation n'a toujours pas été définie ce qui laissera des cursus assez incohérents. La formation des futurs enseignants-chercheurs est au point mort, tout comme la question de la formation continue.

Report de la réforme et remise à plat

Cette réforme, mal engagée, met à contribution énormément de collègues, au détriment de leurs activités de formation et de recherche.
Réussir cette réforme nécessite de revenir sur certaines décisions :

  • cette réforme doit se faire avec les personnels, de manière collégiale. Pour qu'une réforme soit réussie, il faut qu'elle soit acceptée par ceux qui seront chargés de l'appliquer ;
  • la FDE ne peut avoir comme unique débouché l'EN ;
  • l'éducation nationale ne peut avoir une attitude hégémonique sur ce dossier ; le statut juridique du recteur est désormais renforcé (décideur et recours) ;
  • il faut des garanties quant à la gouvernance et le rôle du conseil de l'ESPE ;
  • le master est un tout : il doit être traité comme tel et ne pas être scindé pour cause de concours. L'articulation formation/concours doit, à cet effet, être revue ;
  • le modèle doit être simultané et non successif.

Mais la FDE demande du temps pour les étudiants : l'exact opposé du choix fait par le gouvernement.

Remise à plat

La réforme en l'état est bien loin des exigences du SNESUP.

Nous l'avons dit et nous insistons : une formation d'enseignants nécessite au moins trois années de formation après la licence : deux années de master (stages de pratique accompagnée) et une année de fonctionnaire stagiaire à tiers-temps devant élèves. De plus, l'entrée dans le métier doit être accompagnée d'un allègement de l'ORS et d'une formation.

En dépit de grands discours, le gouvernement n'a pas voulu investir et se sert des étudiants comme moyens d'enseignement dès le M2, refusant de financer une année de formation en alternance avec une décharge conséquente.

A partir de là, toute la réforme est bancale. Il s'agit donc bien d'une remise à plat complète.

Certains collègues ont le sentiment d'avoir travaillé très correctement, dans le cadre des contraintes imposées. Mais ce sont ces contraintes et ces arbitrages qui posent problème. Le gouvernement utilise le localisme (conséquence de la loi LRU et des RCE) et l'urgence pour imposer sa réforme, ce qui a pour conséquence de casser la cohérence nationale et de renforcer le pouvoir des recteurs.

Une remise à plat nécessite du temps, mais ce sera loin d'être suffisant.

Il faut donc un délai d'au minimum un an pour concevoir une réforme viable, ce qui suppose deux années transitoires (2012-2013 et 2013-2014) et pas une seule (deux promotions avec une admissibilité en M1 et admission en M2 ; avec un tiers de temps sur le terrain)

Cette année donnerait le temps de concevoir une formation sur trois années, avec des pré-recrutements, et en articulant les différents volets de la formation avec le concours. Elles donneraient le temps aux étudiants d'avoir une visibilité suffisante pour s'engager vers les métiers d'enseignement.

Il faudra apporter des garanties concernant aussi bien les moyens des IUFM durant cette période (2013-2014) que les personnels. Ce délai supplémentaire ne doit pas être l'occasion pour le gouvernement de ne pas augmenter les moyens de la FDE.

Cela exige et requiert aussi de revenir sur un certain nombre de décisions, notamment budgétaires.

Concernant les ESPE, rien ne presse. Les IUFM et UFR peuvent continuer à assurer la formation pendant encore deux ans sur le modèle transitoire, sans aggraver la situation. Cette phase transitoire va amener les différents acteurs (universités, IUFM, rectorat, etc.), à travailler ensemble. Ce délai d'un an permettrait de retravailler, dans de meilleures conditions les dossiers5 en associant les personnels et d'envisager des partenariats et des collaborations durables.

Il est encore possible d'imposer une remise à plat. C'est pourquoi le SNESUP appelle à ne pas faire remonter les dossiers d'accréditation et à voter contre à toute occasion, sans préjuger du travail des collègues. Il ne s'agit pas de porter une appréciation sur les contenus des dossiers6 mais sur le traitement de la FDE au niveau national.

Il demande, dans le même temps, la création immédiate d'un comité de suivi national de la formation des enseignants et des comités de suivi locaux dans lesquels les personnels pourront jouer tout leur rôle.

Le SNESUP demande un moratoire d'un an, nécessaire à une nécessaire remise à plat de la FDE prévue dans la loi « refondation »

  • Le projet de loi prévoit un fonctionnement des conseils d'ESPE durant 3 mois sans les représentants élus des personnels et des usagers
  • Et immédiat pour les académies qui ont choisi le rattachement à un PRES. Les personnels ne peuvent être affectés dans ce PRES. Une école sans personnels affectés ...
  • Le 5ème bloc a été rajouté par la présidente du Comité suivi master
  • Ce qui est une explication de la hausse du nombre d'inscriptions
  • Y compris la collégialité au sein des futures ESPE, la gouvernance ou encore le rôle du conseil de l'ESPE
  • La majorité des collègues a essayé de travailler au mieux selon les contraintes et il y aura beaucoup d'hétérogénéité entre les dossiers

 

 

Ils nous disent ... 

Intervention de Claire PONTAIS du SNEP, au congrès du SNESUP, le 27 mars 2013 à Villetaneuse

Le débat sur la formation des enseignants est souvent abordé de façon technique, ce qui le rend la plupart du temps incompréhensible par des non spécialistes. Cela vient du fait que nous sommes en réactions aux diverses mesures, sans toujours bien saisir le sens de celles-ci. Mais probablement aussi parce que nous n'avons pas été, collectivement, au bout d'un certain nombre de débats. Le consensus construit dans la période précédente- concrétisé dans le slogan « enseigner est un métier qui s'apprend » - ne suffit pas à régler des problèmes de fond et crée, entre nous, des malentendus. Ces problèmes me semblent être en relation directe avec ceux soulevés dans la loi pour la soi-disant « Refondation de l'école » portée par V.Peillon et dont nous disons qu'elle n'est pas fondamentalement en rupture avec la politique menée par le précédent gouvernement. Prenons quelques exemples :

Tout le monde s'accorde à dire que les enseignants sont des concepteurs, personne ne soutient qu'ils doivent être applicateurs... mais, ces déclarations n'empêche pas V.Peillon de répéter à l'envi qu'il faut diffuser, faire appliquer les « bonnes pratiques », notion qui, par essence, nous porte plus du côté de l'application que de la conception. Autre exemple : la relation terrain-université. Sur ce point, tout le monde souhaite un équilibre et un lien fort. Mais dans la réalité, en faisant le choix d'utiliser les étudiants comme des moyens d'enseignement à 50% de leur temps en M2, la relation est immédiatement déséquilibrée au profit du terrain (car un mi-temps sur le terrain c'est beaucoup plus en préparations, corrections, évaluations...) et minimise de fait la formation universitaire. Même situation sur la recherche : tout le monde trouve cela très important ...! Mais dès qu'il s'agit de faire des propositions concrètes, on ne peut que constater qu'elle est de fait un supplément d'âme. Alors qu'elle est évidente dans la formation des médecins, pour les enseignants, le discours dominant est celui la culpabilisation dans le contexte managérial des « contrats d'objectifs », et non celui de la nécessité de faire faire un bond en avant à la recherche (culpabilise-t-on les médecins quand la médecine n'a pas les solutions pour soigner ? Non, on développe la recherche. Qu'attends-on pour développer et diffuser la recherche en éducation ?!).

Autre exemple : le rapport disciplinaire-professionnel. Lors de la mastérisation « Sarkozy », c'est le disciplinaire qui a primé, le professionnel étant renvoyé au compagnonnage sur le terrain. Aujourd'hui, le discours est sur la « formation intégrée ». Au SNEP-FSU, nous nous sommes battus pour cette intégration et devrions donc être ravis. Mais en fait de formation intégrée, ce qui est proposé est plutôt un coup de balancier vers le « tout professionnel », avec un risque de minimiser très fortement le disciplinaire dès le M1. Comment analyser ceci dans le nouveau paysage qui se profile ?

On sait que le projet du gouvernement - sous l'impulsion de l'OCDE qui souhaite que 50% de la population atteigne une qualification de niveau Licence - est de remodeler le cursus des élèves en deux grands blocs : d'une part « l'école du socle » (pour les 50% qui n'atteindront pas le niveau Licence) et d'autre part le bloc « Bac-3/bac+3 (pour les licenciés et plus). On apprend par ailleurs que ces mêmes licences devront être moins disciplinaires1, une formation très professionnelle minimisant le disciplinaire s'explique encore mieux. Sur ce sujet, les attaques virulentes du SGEN notamment sur les savoirs disciplinaires (qui seraient étriqués, générateurs d'échec...) devraient nous alerter. Dans ce contexte, les « professeurs du socle » n'auraient pas besoin d'un haut niveau disciplinaire, ils pourraient être bivalents (cf. la déclaration de Y.Durand, rapporteur de la loi d'orientation), et les programmes intègreraient des « éducations à ... » (la santé, le développement durable..) s'appuyant sur des compétences transversales. On peut ajouter à ce tableau, la réforme des rythmes -dont un des buts est de diminuer les coûts de l'école obligatoire - et qui à terme peut semer la confusion entre ce qui se fait dans l'école (avec des enseignants) et dans le périscolaire (avec des animateurs). Pris dans son ensemble, ce projet apparait très cohérent avec une formation qui minimise le disciplinaire, au profit d'un professionnel limité à des « bonnes pratiques ». Il nous faut débattre de cela avec les collègues qui défendent un concours de recrutement à Bac+3. Dans le contexte d'aujourd'hui, cette proposition, séduisante pour un tas de raisons, nous semble très problématique pour l'avenir du métier d'enseignant.

Ce que nous voulons c'est une formation qui n'oublie aucun aspect et articule disciplinaire/professionnel, l'ensemble irrigué par la recherche. Et là-dessus, tous les syndicats de la FSU sont d'accord : cela n'est possible qu'avec trois années post-licence (2 années de master + une année complémentaire à mi-temps). L'enjeu d'aujourd'hui est de travailler ensemble aux contenus de ces 3 années et aux revendications qui s'y rapportent (pré-recrutements, contenus de concours, tuteurs, établissements d'accueil, etc.). Ce qui n'empêche pas de la pré professionnalisation dès la licence pour les étudiants qui se destinent tôt au métier d'enseignant.

Pour assurer cette formation, nous voulons une Espé, Ecole universitaire, qui permette un rapport équilibré entre l'employeur et l'Université. Le projet gouvernemental, parce qu'il utilise les étudiants comme moyens d'enseignement dès le début de M2, ne peut que renforcer le poids de l'employeur dans l'Espé (et celui-ci pèserait encore plus si le concours était en L3).
Que faire dans les temps qui viennent, sachant que la place du concours en M1 risque d'être, que cela nous plaise ou pas, une donnée sur laquelle il sera difficile de peser ?
En premier lieu, ne pas éluder les débats de fond sur enseignant concepteur/applicateur, sur le rapport au terrain, sur la recherche, sur le rapport disciplinaire/professionnel. Ensuite, travailler concrète-ment sur nos revendications pour les 3 années post-licence (2 années de master +T1) ; les contenus de concours qui, on le sait, piloteront - qu'on le veuille ou non - les formations ; exiger la baisse du temps de service devant élèves en M2 et obtenir une année de formation supplémentaire en première année de titulaire ; garder le potentiel de formateurs issus des IUFM ; former les tuteurs ; enrichir la relation avec les établissements d'accueil ; permettre aux formateurs titulaires de thèse et qualifiés de devenir enseignants-chercheurs de façon à renforcer la recherche en éducation, etc...

Si nous jouons sur tous ces aspects, ensemble, nous pouvons faire bouger les lignes. (voir les 15 propositions de la FSU du 10 janvier 2013 ; les mandats FSU du congrès de Poitiers en février 2013).

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Déclaration de Boissinot, responsable du nouveau conseil national des programmes. « Dans le cadre du bac+3/bac-3 : aborder les contenus. Ex : série L : les programmes sont trop marqués par la spécificité disciplinaire ; il faut instaurer des programmes aux horaires moins chargés, des enseignement moins spécialisés, en cohérence avec la licence. » (Lettre de l'éducation, n°762, 21 janvier 2012)

 

A propos du Collectif FDE ..

Proposition de fonctionnement :

Les derniers mandats ont prouvé, dans le fonctionnement des secteurs, les difficultés à se déplacer pour les camarades quand il y a autant de sollicitations.

Nous proposons donc plusieurs niveaux de fonctionnement :

  • un noyau de 6 personnes environ, chargées de gérer les dossiers, et servant de comité de rédaction de FDM ;
  • un collectif élargi, comprenant au moins 2 personnes par académie. ESPE/UFR, représentants des futurs ex-centres des IUFM, ... Il est ouvert plus largement à la FSU.
    Il s'agit pour ce collectif élargi de :
    - faire remonter les informations de leur académie ;
    - faire circuler l'information (et pas seulement auprès des camarades) en liaison avec les sections locales ;
    - débattre et argumenter sur les différents dossiers que nous aurons à traiter.
  • un réseau ESPE regroupant les élus locaux (CE, CT, etc.). Cette liste permet de savoir ce qui est fait dans les autres ESPE. Ce réseau sera ouvert à la FSU.
  • une liste de diffusion « fde », en parallèle à la liste forum-fdm, qu'il faudra relancer et qui permette d'atteindre l'ensemble des syndiqués qui interviennent dans la formation des enseignants.

Le collectif organisera un calendrier de rencontres. Le cas échéant, il sera possible de faire venir des membres du collectif élargi quand il y aura besoin.
Il devrait comprendre, en outre, une réunion nationale dès septembre ou octobre, pour analyser la rentrée et faire le point sur la réforme. Il pourrait aussi comprendre une journée « recherche ».