Lettre Flash n°10 : Débat sur la fiscalité : le CIR doit être remis à plat

Publié le : 28/11/2013

 

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Débat sur la fiscalité : le CIR doit être remis à plat

Le premier ministre a décidé d'ouvrir le dossier complexe de la fiscalité. Objet d'intérêts contradictoires, dans un climat social particulièrement tendu où la souffrance sociale se conjugue avec des tentatives de disqualification de l'impôt, ce débat est l'occasion de réhabiliter l'impôt, son rôle dans la solidarité nationale, d'en assurer la lisibilité, la justice et la progressivité. La FSU est intervenue1 dans ce sens à l'occasion des consultations engagées sur « la remise à plat de la fiscalité » par le premier ministre qui a reçu les organisations syndicales lundi 25 et mardi 26 novembre.

Dans un contexte où la stagnation des crédits pour l'enseignement supérieur et la recherche inscrits au Projet de Loi de Finances 2014 fait redouter une aggravation spectaculaire des difficultés budgétaires déjà très sérieuses des universités, le SNESUP souhaite apporter une contribution spécifique à ce débat en attirant l'attention sur le Crédit d'Impôt Recherche (CIR).

Comme son nom l'indique, le CIR a pour but d'encourager, via des exonérations fiscales, les entreprises à investir dans la recherche et l'innovation. Créé en 1983, il n'a pris la forme actuelle et vu son montant augmenter considérablement qu'à partir de 2008. Son attribution, non assujettie à la démonstration de son efficacité en termes d'activités R&D des entreprises, et sa progression selon un rythme sans commune mesure avec le taux d'accroissement espéré de la dépense de R&D, ont essentiellement produit des effets d'aubaine pour les grands groupes.

En vertu des dispositions nouvelles adoptées par le parlement fin 2007 sur la base de chiffrages prévisionnels systématiquement sous-estimés2, le CIR voit son coût réel augmenter d'année en année (estimation pour 2014 : 5,5 à 6,2 Milliards (Mds) d'euros, soit + 20 % par rapport à 20133 !), pour une « efficacité du CIR [...] à ce jour difficile à établir. Faute de données avec un recul suffisant, mais aussi d'un accès des chercheurs aux données disponibles », selon le rapport de la cour des comptes2. Ce constat est d'autant plus grave que le gonflement du CIR constitue la quasi-totalité de l'augmentation des financements publics de la recherche depuis 20064.

Il est patent qu'une large partie de cette manne fiscale n'est pas consacrée à la recherche, mais procède d'un mécanisme « d'optimisation fiscale ». Plus grave, « en matière de contrôle fiscal, la direction générale des finances publiques n'est pas en mesure de cibler ses interventions sur les entreprises les plus à risque, celles en particulier qui font un usage frauduleux (...)2».

Le sévère bilan dressé par la cour des comptes n'est pas unique. Il est partagé par la plupart des quelques 10 rapports, dont 4 rapports parlementaires, rédigés sur le CIR depuis 20082. Ces études ont à maintes reprises confirmé les critiques du CIR portées de longue date par le SNESUP qui exige sa remise à plat, notamment concernant :

  • son volume démesuré et en augmentation considérable depuis 2008, qui détourne ainsi des recettes considérables du service public actuellement sous la pression de l'austérité,
  • son mode de calcul, qui ne tient pas compte d'un accroissement de l'effort de recherche mais de son seul volume,
  • ses conditions d'attribution et la nécessité de contreparties, actuellement inexistantes, particulièrement de la part des grands groupes,
  • le contrôle de son utilisation, à la fois sur les plans scientifiques (brevets, publications, activité de R&D,...) et fiscaux (croissance du personnel de recherche, notamment de docteurs...).

A un moment où le bilan sur l'ensemble des niches fiscales semble faire l'accord du premier ministre, le CIR, niche fiscale emblématique, à l'efficacité jamais établie et fortement contestée, ne saurait être épargné.

1 http://www.fsu.fr/Reforme-de-la-fiscalite-chiche.html
2  rapport de la cour des comptes sur l'évolution du CIR (septembre 2013)
http://www.ccomptes.fr/Publications/Publications/L-evolution-et-les-conditions-de-maitrise-du-credit-d-impot-en-faveur-de-la-recherche
3 A titre de comparaison, le financement public de l'ensemble des organismes de recherche public est de 6 Md€
4 voir chiffres dans : http://www.ccomptes.fr/Publications/Publications/Le-financement-public-de-la-recherche-un-enjeu-national