Lettre Flash n°20 : Madame la Députée, Monsieur le Député, Madame la Sénatrice, Monsieur le Sénateur,

Publié le : 01/03/2013

  

Madame la Députée, Monsieur le Député, Madame la Sénatrice, Monsieur le Sénateur,

Le projet de loi sur l'Enseignement Supérieur et la Recherche (ESR) sera bientôt débattu au parlement.

Alors que les établissements d'enseignement supérieur et de recherche sont en grandes difficultés après plusieurs années de forte diminution des budgets récurrents, d'une détérioration continuelle des conditions d'étude et de travail et d'une précarisation croissante des personnels, ce projet n'apporte pas les ruptures indispensables avec les orientations néfastes de la loi Liberté et Responsabilité des Universités (LRU) et du Pacte pour la Recherche, ni les réponses aux attentes de la communauté universitaire  :

  • le retour à une véritable régulation nationale de l'ESR, notamment adossée à une loi de programmation pluriannuelle des emplois et des moyens, conforme à la réalité des besoins ;
  • des perspectives de rassemblement et de financement cohérents de toutes les formations publiques post-bac autour de l'ESR, pour la démocratisation de l'accès aux savoirs et aux diplômes ;
  • la réintégration dans le budget de l'Etat de la masse salariale des emplois statutaires ;
  • un plan ambitieux de résorption de la précarité ;
  • une politique de recherche sur le long terme, sur la base d'une prospective nationale associant largement les personnels, et porteuse d'une vision qui ne soit pas restreinte à la seule innovation et au seul transfert vers les secteurs économiques marchands.

Le projet de loi, que la ministre de l'ESR présente comme issu d'une large concertation, ne reflète :

  • ni les revendications portées depuis 2009, et celles qui se sont exprimées en parallèle des Assises de l'ESR, aux débats pourtant soigneusement cadrés et limités,
  • ni les constats et les demandes, que les rapports rédigés à l'issue de celles-ci se sont trouvés forcés de refléter, au moins partiellement,
  • ni les orientations et les propositions exprimées par les dizaines d'amendements examinés et votés par le Conseil National de l'Enseignement Supérieur et de la Rechercher (CNESER) et par le Conseil Supérieur de l'Education.

En fait, jamais ne s'est ouverte la véritable négociation que nous demandons. Un mois à peine nous sépare de l'examen parlementaire de la loi sur l'ESR. Il est essentiel que la représentation nationale soit à l'écoute de la communauté universitaire, de ses attentes et propositions afin, qu'avant même le début des débats parlementaires, puis lors de ceux-ci, vous puissiez peser, avec nous, pour des évolutions substantielles du projet.


A titre d'illustration, nous donnons ci-dessous des exemples particulièrement révélateurs de demandes largement partagées par la communauté universitaire, qui ne se retrouvent aucunement dans le projet, alors même que beaucoup d'entre elles ont donné lieu à des amendements votés très majoritairement par le CNESER.

Une mission de formation au service de tous les étudiants... ce n'est pas dans le projet

Des solutions permettant une réelle amélioration de la réussite de tous les étudiants ne peuvent émerger des seules mesures, isolées et limitées, présentes dans le projet de loi (tels les accès réservés en STS et IUT). Une réponse quantitative et qualitative aux besoins de formation de tous les bacheliers nécessite une approche globale, impliquant la construction de parcours variés dans la diversité des formations post-bac, en lien avec la recherche, appuyés sur un cadrage national et bénéficiant de moyens conséquents et pérennes.

Une conception de la recherche ouverte et fructueuse... ce n'est pas dans le projet

Loin de contrer la vision étroite et utilitariste de la recherche portée par la loi LRU, le Pacte pour la Recherche et la Stratégie nationale de recherche et d'innovation, le nouveau projet de loi ajoute encore aux missions de l'ESR le transfert, au seul bénéfice du secteur économique marchand, selon une logique exclusive de compétitivité. Une telle conception menace l'existence même de la recherche, dont elle nie le double rôle : faire avancer les connaissances dans tous les secteurs disciplinaires et agir comme ferment à court, moyen et long termes, des recherches appliquées pouvant conduire à des transferts.

Des moyens récurrents à la hauteur des besoins... ce n'est pas dans le projet

Une programmation pluriannuelle des recrutements et des financements dans tous les domaines de l'ESR est une demande primordiale, totalement absente du projet. Sans réel réengagement de l'Etat, le nombre d'établissements en déficit, la course sans fin aux financements sur projets et la précarité qu'elle encourage, les gels et suppressions d'emplois, ne peuvent que se multiplier, affaiblissant potentiels de recherche et de formation, dégradant les conditions de travail des personnels et des étudiants. Une stratégie nationale de l'ESR, accompagnée de moyens récurrents à la hauteur des besoins, doit être inscrite dans la loi et se substituer à la politique actuelle, essentiellement fondée sur des appels à projets.

Le renouveau de la démocratie et de la collégialité... ce n'est pas dans le projet

Malmenées par la loi LRU, la collégialité et la démocratie doivent retrouver toute leur place dans les universités. Elles requièrent la complémentarité des divers conseils, instances et structures universitaires. A l'opposé des propositions figurant dans le projet, elles nécessitent de revenir sur le rôle exorbitant de CA "stratégiques", sur leur composition et sur leurs modalités d'élection et de désignation, qui demeurent inacceptables ; ce renouveau passe aussi par une limitation des pouvoirs des présidents et du poids des membres extérieurs dans les conseils. Alors que la suppression de l'AERES et de l'évaluation à tout va  était impatiemment attendue, le projet de loi ne propose que de timides évolutions, loin de la remise à plat espérée des objectifs et des modalités de l'évaluation et recrée, sous un autre nom, une instance majoritairement constituée de membres nommés.

Des collaborations facilitées au sein d'un service public renforcé... ce n'est pas dans le projet

L'empilement actuel de structures bureaucratiques enferme les relations entre établissements et organismes dans des schémas de concurrence et éloigne les personnels des lieux de décisions stratégiques. Les regroupements territoriaux instaurés par le projet de loi donneraient un pouvoir accru aux collectivités locales, aggravant encore les fortes disparités régionales et conduisant à une remise en cause de l'égalité territoriale de l'ESR. En outre, le caractère obligatoire de ces regroupements et leur ouverture à des établissements et organismes privés, permettrait des transferts vers le privé de compétences et de moyens, qui doivent rester ceux du service public.

La résorption de la précarité, l'amélioration des statuts et des conditions de travail... ce n'est pas dans le projet

La mise en concurrence systématique, les années de précarité, la menace du chômage, les services chaque année plus lourds, les perspectives de carrière bouchées,... engendrent souffrance et découragement. Toutes ces questions sont pourtant au cœur des préoccupations quotidiennes des personnels de l'ESR ; elles sont totalement absentes du projet de loi.

Dans tous les domaines, sur toutes ces questions, c'est une tout autre loi qu'il faut pour l'ESR.



Nous attendons de votre engagement qu'il permette d'aboutir à un texte répondant aux attentes de la communauté universitaire, pour la société, pour le service public de l'enseignement supérieur et de la recherche, pour les étudiants et les personnels.

À télécharger sur le site :

Communiqué intersyndical pour le 5 mars rendez-vous parisien : à 14h, Rue Saint-Denis, à  l'intersection avec la rue de Rivoli
Le-Snesup/L-actualite-du-SUP?aid=6603&ptid=5