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Publié le 3 janvier 2006

Concours de recrutement des enseignants: les réductions contre « l’ascenseur social »
Une intéressante contribution de quatre professeurs d’université (Le Monde 28 12 05)

 

« Rien ne justifie la réduction des recrutements aux concours de l’éducation nationale, les rouvrir constituerait un signe positif pour les jeunes défavorisés »

C’est la conclusion principale de cette tribune, pourtant rédigée avant les annonces de réductions massives des postes mis au concours, ce 21 décembre.

Les auteurs soulignent trois éléments clés de ce lien entre concours de recrutement et démocratisation :

  • la nécessité d’ouvrir l’enseignement supérieur, spécialement les cursus longs aux jeunes des « quartiers ghettoïsés »;
  • le besoin de concevoir les études supérieures en lien avec des perspectives professionnelles réelles;
  • « une politique pluriannuelle de recrutement est possible et souhaitable puisque les besoins sont parfaitement prévisibles ».

Sur ces bases, les auteurs développent la proposition qu’il faut mettre en place un système de pré-recrutement comparable aux IPES des années 60-70 : les étudiants percevaient un salaire lié à la préparation des diplômes et des concours. Ce système a effectivement permis à nombre de jeunes de milieu modeste d’accéder au professorat dans le secondaire, et souvent, ensuite à un poste d’enseignant chercheur.

Certes cette tribune laisse peut laisser interrogatif :

- l’accent mis parfois par les auteurs sur les seuls « jeunes les plus doués » des quartiers pauvres affaiblit l’idée de « faire repartir l’ascenseur social », pour l’ensemble des jeunes. La proposition de pré-recrutement est pourtant à l’oppose du modèle de l’élitisme pour les pauvres méritants

- l’explication unique de la baisse des effectifs étudiants dans les disciplines générales, notamment scientifiques, par la seule réduction du nombre de postes mis au concours est discutable. Mais ce questionnement a le grand mérite de mettre l’accent sur l’importance prouvée des pré-recrutements. Rappelons que ce dispositif est proposé depuis longtemps par le SNESUP-FSU, qui demande sa mise en place pour les enseignants-chercheurs.

Mais telle qu’elle est cette réflexion de quatre universitaires pose l’exigence forte de la démocratisation de l’enseignement supérieur, de mesures concrètes pour relancer « l’ascenseur social ». C’est de pleine actualité, avec la crise des banlieues et avec les décisions du Ministre de réduire de 30 % le nombre de postes mis aux concours de recrutement ! Une tribune critique et novatrice, ce n’est pas son moindre intérêt.


Maurice Hérin
le 19/01/2006