Rap. Hamelin : sciences

Publié le : 01/12/2003

DEVELOPPEMENT ET DIFFUSION
DE LA CULTURE SCIENTIFIQUE
ET TECHNIQUE

UN ENJEU NATIONAL

Rapport établi à la demande du Premier
Ministre
auprès du Ministre de l’Education Nationale
du Ministre de la Culture et de la Communication
de la Ministre déléguée à
la Recherche et aux Nouvelles technologies

Par Emmanuel HAMELIN
Député de Lyon

Novembre 2003


Sommaire

Lettre de Mission

Remerciements particuliers

1ère Partie - De la nécessité du développement et de la diffusion de la culture scientifique

Introduction
I – Les origines de la culture scientifique et technique
II – Les initiatives présentes

2ème Partie – Renouer le dialogue entre science et société
I – Le déficit de connaissance scientifique, producteur d’inégalité sociale
II – La culture scientifique et technique vecteur de développement pour les entreprises
III – Le rôle et le devoir des Médias
1- La place de la science dans les médias
a) Problématique de diffusion de la culture scientifique
b) La place des émissions scientifiques à la télévision
c) La place des émissions scientifiques à la radio
2- Une ambition nouvelle pour les producteurs
3- Soutenir des projets innovants
IV – L’édition scientifique
V – Le rôle essentiel des bibliothèques et des établissements publics culturels pour la diffusion de la culture et de l’information scientifiques et le nécessaire renforcement de l’offre éditoriale
1 - Renforcer les collections des bibliothèques dans le domaine des sciences et techniques

a) Renforcement des dispositifs d’aide du Centre National du Livre – CNL

b) Diffusion d’une bibliographie pour la constitution de collections de référence « de base »

2 - Renforcer le rôle des établissements publics du ministère de la culture au bénéfice de l’ensemble du réseau

a) Amélioration de l’offre documentaire de la BPI – Bibliothèque Publique d’Information et mise en œuvre d’un accès facilité des bibliothèques aux ressources en ligne

b) Déploiement des missions de la médiathèque de la Cité des sciences au bénéfice de l’ensemble des bibliothèques publiques

3 – Amélioration de la formation des responsables de bibliothèque

4 – Le nécessaire renforcement de l’offre éditoriale

a) Vers une « librairie » de la culture scientifique et technique
b) un salon du livre dédié aux sciences et techniques

5 – L’information scientifique et technique

VI – La culture scientifique et technique dans les domaines patrimoniaux

1 – Les actions du Ministère de la Culture
a) Valorisation du patrimoine scientifique
b) Le Ministère de la Culture au service des institutions scientifiques
c) Aides aux établissements d’enseignement supérieur
d) Favoriser l’émergence de débat

2 – L’archéologie

3 – Les monuments historiques

4 – Les Journées du patrimoine

VII - Art et science

3ème Partie – De l’école à la communauté scientifique

I - Désaffection des jeunes pour les études scientifiques

II – Un système scolaire ouvert sur la culture scientifique

1- L’école primaire et secondaire

2 – Le lycée

III – Une place nouvelle pour les filles

IV – L’enseignement supérieur

1- Une expérience à développer : l’Université des sciences Joseph Fournier à Grenoble

2- Favoriser l’esprit scientifique

3- Amélioration des conditions financières accordées aux meilleurs étudiants

V – Pour une amélioration globale du système

1- Les Programmes

2- Des instruments pour une meilleure information

VI – Pour une mobilisation de la communauté des chercheurs

4ème Partie – Les grandes institutions nationales

I – Placer la Cité des Sciences et de l’Industrie au cœur du dispositif. Bâtir un pôle d’excellence à dimension nationale
a) Le rôle de la médiathèque de la Cité des Sciences par rapport aux bibliothèques publiques en France
b) Un partenariat privilégié avec les collectivités locales, les CCSTI et les DRAC
c) Assurer une fonction d’impulsion et de coordination de la culture scientifique, technique et industrielle
d) Le Groupe des Quatre

II – Palais de la Découverte

III. Le Musée du Conservatoire National des Arts et Métiers

1) Le patrimoine national scientifique et technique

2) Une mission pédagogique et culturelle
a) L’accueil des scolaires
b) L’accueil du grand public
c) Les évènements et manifestations
d) Le musée hors les murs
e) Le musée virtuel
f) L’expertise et la recherche
g) Les limites à l’action : des moyens insuffisants

IV. Le Muséum National d’Histoire Naturelle

5ème Partie – Un dispositif renouvelé et adapté

I – Une mission nationale pour la culture scientifique et technique

II - Les Centres de cultures scientifiques et techniques – CCSTI

III – Une Fondation de la culture scientifique et technique

IV – L’interaction entre initiatives nationales et locales

V – Le rôle essentiel des associations

VI – Le poids des grandes manifestations comme la Fête de la Science

VII – Vers la création d’un Portail science

Récapitulatifs des principales mesures proposées

Suites de la Mission

Personnes auditionnées


Rapport au format pdf (624Ko - par exemple pour impression)

Remerciements particuliers à :

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Mme Elodie ZIEGLER, Conseillère Technique au Cabinet du Ministre de la Culture et de la Communication

M. Olivier FARON, Conseiller au Cabinet de la Ministre déléguée à la Recherche et nouvelles technologies

Mme. Brigitte VOGLER, Chef de la Mission de la culture et de l’information scientifiques et techniques et des musées - Recherche et nouvelles technologies

 

M. Stéphane BRIDEL, Mon Attaché Parlementaire à l’Assemblée Nationale

Lettre de Mission

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Monsieur le Député,

La société française perçoit la science de manière ambiguë. En effet, si la science conduit à des réussites incontestables pour la recherche et l’innovation, la complexité croissante des savoirs scientifiques et l’incertitude dont ils sont porteurs suscitent l’inquiétude de la société. Parallèlement la désaffection des élèves et des étudiants vis-à-vis des filières scientifiques est préoccupante pour nos entreprises et notre compétitivité au plan international.

En dépit de l’image contrastée qu’elles présentent à la société, la science et la technologie jouent un rôle de plus en plus important, qu’il s’agisse des grands enjeux contemporains ou des conséquences qu’elles induisent dans notre vie quotidienne. C’est précisément parce qu’elles jouent un rôle central qu’il faut éviter que la science et la technologie ne deviennent des enjeux exclusifs de toute autre préoccupation. Au contraire la culture scientifique et sa diffusion doivent permettre de nouer ou de renouer le dialogue entre la société et les sciences. Elles doivent contribuer à réduire des inégalités et des fractures au sein de la société. L’accès aux savoirs scientifiques et technologiques constitue un moyen essentiel d’affirmer une citoyenneté forte, aussi bien nationale qu’européenne, tant la culture de la science mérite d’être pensée à l’échelle du continent tout entier.

L’enjeu que représente la production d’une culture de la science me semble devoir mobiliser la communauté des chercheurs et des enseignants chercheurs, les organismes de recherche et les établissements d’enseignement supérieur. Il convient de réfléchir aux instruments les mieux adaptés pour lui donner toute sa portée.

La transmission de la culture de la science doit être assurée par les institutions dont la vocation est de s’y consacrer, en premier lieu par la Cité des sciences et de l’industrie, le Palais de la Découverte, les musées des sciences, les centres de culture scientifique et technique. Cette transmission doit également être l’affaire des bibliothèques, des centres artistiques et des centres culturels, ainsi que des différents médias, télévision, radio, presse, édition et internet. Le tissu associatif est bien sûr destiné à jouer un rôle important.

Enfin, une meilleure diffusion de la culture de la science requiert un dispositif conceptuel renouvelé et adapté. Il convient aussi de réfléchir aux correspondances à développer entre la culture scientifique, l’histoire, l’épistémologie, l’art, toutes les disciplines qui peuvent contribuer à susciter pour la science davantage d’intérêt et une meilleure compréhension.

La communauté éducative dans son ensemble a vocation à participer à la mise en valeur de la culture de la science, de même que les différents décideurs. Il importe dans tous les cas de définir une politique équilibrée sur l’ensemble du territoire national, politique à laquelle les collectivités locales doivent nécessairement participer.

Ce chantier suppose donc une action structurée et d’envergure.

Je vous remercie d’avoir bien voulu accepter de conduire cette mission de réflexion et de proposition sur la formation et la diffusion de la culture scientifique. Vous serez, par conséquent nommé en application de l’article LO144 du code électoral parlementaire en mission auprès du ministre de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, du ministre de la culture et de la communication et de la ministre déléguée à la recherche et aux nouvelles technologies.

Je souhaite que ces départements ministériels vous apportent leur concours et vous mettent en mesure de formuler des propositions et des orientations générales, loin de tout cloisonnement entre disciplines et secteurs. Dans l’accomplissement de votre mission, vous pourrez vous inspirer des travaux qui ont pu être effectués sur la culture scientifique. Il convient notamment à cet égard que vous puissiez exploiter les perspectives tracées par le sénateur Laffitte à l’occasion de sa mission parlementaire.

Je souhaite que vous puissiez me remettre votre rapport dans un délai de trois mois afin que le Gouvernement puisse sur cette base engager sans retard la politique d’ensemble dont notre pays a besoin dans ce domaine.

Je vous prie de croire, Monsieur le Député, à l’assurance de mes sentiments les meilleurs.

Jean-Pierre RAFFARIN

1er Partie - De la nécessité
du développement et de la diffusion de la culture scientifique.

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La culture scientifique traverse aujourd’hui une crise profonde. Les formations scientifiques et les filières techniques subissent une désaffection des lycéens et des étudiants. Pourtant, il existe dans le public une demande sociale croissante pour comprendre les mutations actuelles de la science et des techniques, notamment pour ce qui concerne les bio-technologies ou l’énergie.

Ainsi, il est étonnant de constater qu’à une récente enquête, plus de 35% des Français se déclaraient très intéressés par la perspective de développer leurs connaissances en médecine, en zoologie et en botanique, alors que seuls 20 à 30% répondaient positivement 10 ans plus tôt.

Il convient de souligner la discrétion du discours politique au plus haut niveau, qui depuis des décennies n’évoque pratiquement jamais, ou que timidement, les questions de politique scientifique.

Comme le rappelle M. Jean-Marc LEVY-LEBLOND, professeur à l’Université de Nice, dans le magazine XXIème siècle N° 6 du Ministère de l’Education Nationale, " nous pouvons constater que se manifestent actuellement, à la fois l’absence et l’urgence d’une intégration de la science dans la culture commune ".


Et si l’on ne comprend pas le monde qui nous entoure, comment peut-on réellement en être acteur et citoyen ?

Comme l’indique Albert Jacquard, " vulgariser la science, diffuser les concepts scientifiques au plus grand nombre, c’est faire progresser la société ".


 

I – Les origines de la culture scientifique et technique.

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Le concept de diffusion de culture scientifique est apparu à la faveur de la loi d’orientation et de programmation de recherche de 1982 dans le cadre du programme " Promotion du Français, langue scientifique et diffusion de la culture scientifique ".

 

 

 

 

Des actions avaient déjà été conduites par le BNIST (Bureau national de l’information scientifique et technique), puis la MIDST (Mission interministérielle de l’information scientifique et technique) créée en septembre 1979 auprès du Secrétariat d’Etat à la Recherche auprès du Premier Ministre.

La loi d’orientation de 1982 a été accompagnée par une augmentation des crédits qui sont passés de 3 MF en 1982 à 40 MF en 1988. Cet effort financier a permis de soutenir l’émergence de pôles en région, notamment les associations loi 1901 dénommées " Centres de culture scientifique, technique et industrielle " dont la Cité des Sciences et de l’Industrie, établissement public créé en 1985, et qui devait en être la tête de réseau.

Parallèlement, de nombreuses associations dites " d’éducation populaire " se sont créées et ont inclu dans leur activité la diffusion de la culture scientifique et technique ainsi que des écomusées et des musées de société.

La décennie suivante a permis l’ouverture ou la rénovation d’autres espaces: la Grande galerie de l’évolution du Muséum National d’Histoire Naturelle en juin 1994, le Musée des Arts et des Métiers en mars 2000 et le Musée National de l’Education à Rouen en décembre 2001.

 

II – Les initiatives présentes.

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La conjoncture actuelle est favorable à la définition d’une politique de la culture scientifique, avec une impulsion nationale forte.

Aujourd’hui, les acteurs sont multiples et variés puisqu’en dehors des organismes de recherche, des musées scientifiques nationaux, nous dénombrons sur l’ensemble du territoire :

  • 174 musées scientifiques, sur un total de 3 000 musées en France 
  • 54 centres structures associatives et CCSTI 
  • 13 associations d’éducation populaire, regroupées au sein du CIRASTI (Collectif inter-associatif pour la réalisation d’activités scientifiques et techniques internationales) 
  • environ 150 associations sur le territoire.

Sans oublier les compagnies artistiques et les nombreux bénévoles.

En outre, les deux grandes institutions parisiennes de diffusion de la culture scientifique sont aujourd’hui à la croisée des chemins.

  • la Cité des Sciences jouit d’une fréquentation et d’un dynamisme exceptionnels en 2003, tout en entreprenant d’importants projets de rénovation.
  • Le Palais de la découverte entre également dans une époque nouvelle, avec sa fermeture programmée de 2005 à 2007, dans le cadre des travaux du Grand Palais.

Enfin, le Ministère de la Culture marque désormais un intérêt nouveau pour la promotion de la culture scientifique comme un élément de la culture générale des Français.

Les parties suivantes s’attachent donc à définir, de façon très concrète, les mesures qui pourraient, en s’appuyant sur cette conjoncture favorable, conférer une impulsion déterminante à la diffusion de la culture scientifique en France.

 

 

2ème Partie – Renouer le dialogue entre
science et société.

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I – Le déficit de connaissance scientifique, producteur d’inégalité sociale.

Les dernières années ont été marquées par la poussée, abondamment relayée par les médias, de grandes peurs : clonages, OGM, changement climatique, virus informatiques? L?exemple de la vache folle témoigne d?une dérive classique : un problème de mauvaise gestion industrielle débouche de manière insidieuse sur des attaques contre la science.

De manière plus générale, les risques liés à une innovation technologique sont vécus comme les signes d’une science se fourvoyant.

Il convient de constater la faiblesse du socle commun de connaissances scientifiques, ce qui est d’autant plus grave puisque cela constitue aujourd’hui l’une des principales fractures sociales.

Afin d’illustrer cette partie, je crois utile de reprendre un extrait de l’excellente intervention de Monsieur Etienne-Emile BAULIEU, Président de l’Académie des Sciences, intervention qu’il a prononcée lors de la séance solennelle de rentrée des cinq Académies, sur le thème : " Changements de la science, progrès pour l’Homme ? ".



" L’Homme domine le monde vivant, grâce à la science. Celle-ci progresse sans nul doute, mais soudain une question surgit : ses changements contemporains seraient-ils devenus contre-productifs ? Comment cette science plus féconde que jamais, si spécifique de notre espèce, peut-elle être mise en examen au tribunal du progrès humain ? L'humanité est-elle devenue hypocondriaque pour douter à ce point de sa santé collective !

Le sentiment de progrès est un sentiment de confiance ; aujourd'hui le doute a remplacé la confiance.

Pour nous scientifiques, l’activité de la science vise à comprendre : comprendre le monde, comprendre le destin de l’homme et participer à son questionnement métaphysique. Nous, scientifiques, savons combien notre condition humaine, équilibre entre le corporel, le cérébral, le spirituel est à la fois vulnérable et aléatoire. Nous savons que nous ne savons pas prédire l’avenir de notre espèce, et peut-être est-ce la grandeur de notre condition humaine.

La première perception du progrès tient aux différents usages de la technique : des améliorations concrètes, immédiatement utiles. Le génie de l’homme, son infatigable manie d’essayer, l’ont conduit à voler le feu, à capturer le vent, à semer des graines, à inventer la roue… à " faire " avant de comprendre, à agir avant d’analyser, et bien souvent la technique a interrogé et stimulé la recherche fondamentale par ses observations. Dans l’histoire de l’humanité, la technique a souvent précédé la science. Mais, naturellement aussi, la technique accompagne la science et fréquemment lui succède en concrétisant ses concepts et en appliquant ses découvertes. La science et ses applications ont engendré deux percées refondatrices de la condition humaine : d’une part l'extraordinaire développement des moyens de communication, qui abolissent les distances entre les hommes ainsi qu’entre les cultures, et, d’autre part, l’implacable accroissement jusque-là silencieux de la longévité humaine.

Le doute qui saisit l’époque me paraît lié au double sentiment de pouvoir et d’impuissance qu’a l’homme vis-à-vis de la nature et de lui-même. Le sentiment de pouvoir est sans doute né des interrogations et des craintes sur l’usage de l’énergie nucléaire : l’homme maintenant craint son propre pouvoir.

Il a désormais plus peur de lui-même que de la nature ! Or, depuis l’origine, les phénomènes naturels ont menacé de très près les hommes. L’homme a réussi à résister, se protéger, et même à utiliser bien des forces de la nature : le feu, l’électricité, l’atome… La science a libéré l’homme de ses peurs, de ses superstitions d’une nature enchantée car la science donne à voir la nature comme indifférente. C’est en quelque sorte un libre arbitre conquis par rapport à la nature. Mais désormais l’homme s'interroge : saura-t-il protéger la nature de lui-même et de ses excès ? Certains redoutent que l’activité des hommes n’altère notre environnement, notre climat, nos océans, notre atmosphère, ne les fragilise, ne les prive de leurs possibilités de régénération. Au point qu’ils s’interrogent pour savoir si notre développement est durable, ou s’il faut en changer.

La question du rapport de la science avec la nature est au cœur du doute actuel sur les progrès de la science et se pose en des termes nouveaux à propos du monde vivant, animal et végétal. À partir de l’exemple des organismes génétiquement modifiés, les O.G.M., je voudrais illustrer la passion et la difficulté des rapports de la Science avec le sentiment de progrès.

Voici que vient de commencer la grande aventure de la maîtrise des éléments fondamentaux du vivant, avec la découverte de l’arrangement de l'A.D.N. des gènes. " Maîtriser le vivant " veut dire que l'on sait de mieux en mieux isoler, découper, recombiner, transférer cet A.D.N. des gènes. Dans le cas des O.G.M., les caractéristiques du monde végétal peuvent être directement soumises à notre volonté : créer des plantes qui ont un meilleur rendement, qui résistent mieux au froid ou au chaud, à l'eau ou à la sécheresse, à certains pesticides, qui peuvent empoisonner spécifiquement les prédateurs animaux, créer des plantes qui se conservent mieux… Or le sigle O.G.M. est mondialement stigmatisé, plus encore que les produits eux-mêmes. Quel affreux symbole, cet été au Larzac, d'avoir mis en avant des centaines de volontaires prêts à les faucher ! Pourquoi tant de haine ? Cette violence est à la mesure de la peur, de l’ignorance et de l’idéologie.

Cette peur, on peut la comprendre tant il s'agit d'un tournant, d'un grand changement de la science : fondamentalement, on détourne sciemment le " naturel ". À la vérité, ce que nous appelons " naturel " évite de se souvenir que, par sélection et hybridation, les hommes avaient depuis des millénaires, modifié des espèces végétales au fur et à mesure de leur histoire, et selon leurs besoins alimentaires et culturels.

Cette découverte théorique de la maîtrise des gènes inquiète : en suscitant une alternative à la sélection darwinienne, la science fait accéder l'homme à un niveau jusque-là réservé à l'obscur dessein de l'évolution, si ce n'est à une puissance divine plus ou moins redoutée.

Cette inquiétude a pour première réponse la méthode de critique et de doute qui gouverne la science. C'est parce que son propos est de conquérir le savoir qu'elle est suspectée d’arrogance. A-t-elle la tentation du pouvoir ? Les hommes de science d'aujourd'hui ne sont pas, contrairement à l’image du positivisme d’Auguste Comte, les adeptes du " tout-scientifique ", pas plus que d’un quelconque " tout-économique ". Ils savent que ce sont les croyances, les valeurs morales, politiques, culturelles et affectives d’une époque qui déterminent le bon ou le mauvais usage des découvertes.

 

 

Après la peur, l’ignorance. L’exemple d'un nouveau maïs, le " maïs-t " illustre bien un malentendu qui repose d'abord sur une mauvaise compréhension du mécanisme en cause et des objectifs poursuivis. Dans " maïs-t ", le " t " représente l’élément génétique d'une bactérie (bacillus thuringiensis) qu'on ajoute à l'A.D.N. du maïs (c’est l'objet de la modification O.G.M.) et qui permet la synthèse d'une protéine tueuse de la chenille pyrale, ennemie du maïs. Le maïs ainsi modifié, la récolte sera épargnée par la chenille. La méthode plus traditionnelle est l'utilisation complexe et polluante d'insecticides qui, certes, sauveraient la récolte, mais qui causeraient d’autres effets négatifs sur l’environnement.

L’histoire des insecticides, du D.D.T. aux pastilles enrobées qui menacent nos abeilles, est celle d’un équilibre entre les avantages pour les récoltes et les inconvénients pour l’environnement. Les méthodes ont évolué, sans qu'il faille ostraciser ou diaboliser l’une plutôt que l’autre.

Comment sauver aujourd’hui ces nouveaux êtres de la famine sans une nouvelle révolution agraire ?

La révolution des O.G.M. est un progrès indispensable. Ceci ne veut pas dire que notre confiance doive être aveugle. Dans le cas d'espèce, la science se doit de prévoir l’apparition et la multiplication d'insectes résistant au gène si efficace contre la chenille : pour se débarrasser de ces mutants, il faudra encore plus de recherche pour détecter et circonvenir cette évolution possible. Il faut conserver des champs de maïs non transformés et prévoir des O.G.M. en quelque sorte " alternatifs ". C'est la science évolutive dans la société, au service d'une humanité plus nombreuse et qui vit plus longtemps.

Ce qui est fascinant avec les O.G.M., c'est l'implication conjointe des éléments essentiels de la matière vivante – les gènes, aussi redoutés qu'incompris – et de nos comportements parmi les plus fondamentaux, ceux liés à notre alimentation. Les ressorts de ces comportements sont, pour chacun de nous, enracinés familialement, culturellement. Ils s’inscrivent même parfois dans une tradition religieuse. Dans notre pays, l'alimentation a fait de la gastronomie un des beaux arts. Son impact sur notre santé est mieux établi que jamais. Notre nourriture fait partie intégrante de notre personnalité.

Il semble aussi difficile de se faire aux O.G.M. au début du XXIe siècle, que de monter dans les trains au milieu du XIXe, où l'on craignait de mourir dans les tunnels, ou d’installer des fils électriques dans les églises après la découverte de Franklin, alors qu'ils étaient considérés comme blasphématoires.

Après la peur et l'ignorance, voici enfin l’idéologie : ceux qui s'opposent violemment aux plus précautionneuses recherches sur les O.G.M., et le font avant même de connaître le résultat des expériences.

Ainsi le nécessaire débat entre la science et la société se trouve faussé et obscurci. Il est pourtant urgent de montrer, de donner à voir ce que sont ces découvertes, et de débattre de leur utilisation. Il importe de ne pas faire du principe de précaution un principe de suspicion ni une pratique d'inaction, mais de rechercher, vérifier, contrôler, sans négliger aucune critique, et d'être toujours prêt à des solutions différentes. C'est le devoir d'humanité et la responsabilité politique des scientifiques dans la Cité…

?Comment ces changements et ces progrès influencent-ils notre bonheur, personnel, amoureux, familial ? Je crois qu'avec le feu, l'électricité, les antibiotiques, nous sommes plus heureux que les hommes qui dessinèrent Lascaux : nous avons plus de temps à vivre, pour être libre et pour aimer. Mais leur art nous parle et nous touche : le continuum entre nous tient sans doute à l'affectivité, à l'imaginaire, aux désirs, qui ne se résument pas à des conditions de vie, à des savoirs. Nos progrès nous déterminent : ils ne nous définissent pas.

On pourrait aujourd'hui avoir la tentation de s'en tenir aux acquis d'une humanité qui dispose déjà de tant de moyens pour mieux vivre, et choisir de mieux les partager. Je comprends ce sentiment, cette intuition qu'il faudrait marquer une pause.

Mais il ne faut pas compter sur un palier de l'évolution scientifique, sur un moratoire du changement : c'est une hypothèse totalement irréaliste – et bien des conservateurs tranquilles, qui ne me sont pas antipathiques pour autant, vont le regretter. L'homme invente, veut savoir toujours plus, qu'il s'agisse du climat, des planètes alentour, des possibilités de vie prolongée en bonne santé et pleine lucidité. C’est irrépressible. Aux hommes et aux femmes, à leurs représentants, à leurs civilisations, d’en faire des bonheurs, d’accompagner ces percées, et d’inventer les règles de vie qui en feront des progrès pour le genre humain ".


 

 

 

 

 

 


II – La culture scientifique et technique vecteur de développement pour les entreprises

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La Science et la Technologie sont trop souvent présentées dans les médias comme étant essentiellement sources de problèmes : on ne parle que rarement de la première pour montrer que son rôle est toujours nécessaire pour révéler et comprendre ces problèmes, ni de la seconde pour dire qu’elle peut apporter des solutions, lesquelles sont ensuite mises en œuvre, ou ne le sont pas.

On oublie qu’Internet ou le téléphone portable sont des conséquences du travail de physiciens, et les immenses succès de la science finissent par créer une sorte de saturation de l’émerveillement, tout en laissant subsister l’inquiétude.

Au Québec, on essaye d’attirer des enseignants étrangers afin de les recruter dans les Universités, grâce à une dispense de tout impôt sur le revenu pendant cinq ans.

 

III – Le rôle et le devoir
des Médias

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1- La place de la science dans les médias.


  1. Problématique de diffusion de la culture scientifique.

  2. Il faut intégrer une problématique scientifique dans les programmes des écoles de journalisme et à terme, aller vers l’identification d’un profil de " journaliste scientifique " ayant suivi un double cursus.


    Programme d’échange chercheurs/journalistes.

    Ce programme est initié et mis en œuvre conjointement par la Mission de la culture et de l’information scientifiques et techniques et des musées techniques du ministère en charge de la recherche et l’association des journalistes scientifiques de la presse d’information (AJSPI).

    Face à la demande croissante d’informations scientifiques de la part des citoyens, chercheurs et journalistes devront de plus en plus collaborer. Cependant, les chercheurs se plaignent souvent du traitement médiatique qui leur est réservé; les journalistes considèrent le monde de la recherche comme un univers complexe et difficile d’accès.

    Ceci a conduit à initier un programme qui avait pour objectif de faire prendre conscience aux chercheurs et aux journalistes scientifiques de la complexité de leur travail et quotidien réciproque en les accueillant pendant une semaine dans une salle de rédaction pour les chercheurs et dans un laboratoire pour les journalistes.


  3. La place des émissions scientifiques à la télévision.


  4. La télévision doit assumer son rôle à l’égard de la culture scientifique comme de la culture en général. La télévision doit prendre conscience de son importance dans l’évolution même de la société en tant que maillon stratégique dans ce processus de diffusion. Elle doit expliquer plus que séduire, faire comprendre autant que décrire.

    La télévision, (et la télévision publique en particulier), doit assumer sa responsabilité de diffuseur de la culture scientifique, en insistant sur la programmation de journaux et autres documents scientifiques.

    Il serait à cet égard utile de réaliser un état des lieux précis de l’offre de culture scientifique à la télévision, qui est loin d’être absente dans les émissions programmées (" c’est pas sorcier ", " E=M6 ", " savoir plus santé ", " rayons X ", " on vous dit pourquoi ", et bien sûr sur France 5 " Gaïa ", " question science ", le journal et le magazine de la santé…).


    En outre, certains documentaires scientifiques ont fait l’événement, comme " l’odyssée de l’espèce," avec une audience importante, et pourraient très certainement être renouvelés voire multipliés.

    De façon générale, il est essentiel de bien considérer la culture scientifique comme partie intégrante de la culture générale et de l’inclure ainsi dans les objectifs que le gouvernement entend fixer au service public en matière de programmes de culture et de connaissance, notamment dans le cadre de l’élaboration du contrat d’objectifs et de moyens pour France Télévision.

    La culture à la télévision, ne doit pas être prise dans une acception restrictive qui la limiterait aux Beaux-Arts, mais bien au sens large de culture générale, incluant les connaissances scientifiques et techniques dans les domaines les plus variés.


  5. La place des émissions scientifiques à la radio.


  6. La culture scientifique est présente à la radio : on peut citer notamment des émissions comme " CO2 mon amour " sur France Inter, les émissions scientifiques de France culture comme " sciences frictions ", " science culture ", " continent sciences "  etc… les chroniques scientifiques sur France Info : " Info sciences ", " Info santé ", " l’invité science ", " profession chercheur ", " histoire d’Homme ", " du côté des étoiles ", " planète mer ", " planète environnement ".

    Comme pour la télévision, il est indispensable de procéder à un état des lieux précis de l’offre de culture scientifique proposée à la radio et de veiller à ce que la science soit partie intégrante du développement des programmes culturels à la radio et sur Radio France en particulier.

 


2- Une ambition nouvelle pour les producteurs.


Les producteurs scientifiques se sont réunis au sein de l’AST – Association Science Télévision, qui représente 80 % de la production scientifique.

L’association regroupe 55 producteurs, qui ne sont pas exclusivement des producteurs de films scientifiques.

Il faut souligner que l’incitation des chaînes à diffuser des programmes scientifiques aura un impact sur la demande de production de tels documents. Il est donc essentiel de s’appuyer sur les diffuseurs.

Il serait utile que le Centre National de la Cinématographie étudie les mécanismes susceptibles d’améliorer le fonctionnement actuel de l’aide (COSIP) visant à soutenir les productions de programmes de culture scientifique.


Le GISC – Fonds pour le développement de l’audiovisuel scientifique.


La Direction de la Recherche et la Direction de l’audiovisuel du CNC ont décidé de créer un Groupement d’Intérêt Scientifique et Culturel (GISC) dénommé : " Fonds pour le développement de l’audiovisuel scientifique ".

Les objectifs de cette structure sont  :


  • faciliter la rencontre entre les chercheurs, les producteurs et les diffuseurs 

  • encourager la conclusion de contrats de développement entre les chercheurs et les producteurs 

  • attribuer des aides financières aux projets ayant donné lieu à la conclusion d’un contrat de développement entre les chercheurs et les producteurs 


Les missions doivent :


  • sélectionner des projets et soutenir les projets les plus ambitieux autant sur le fond que sur la forme, élaborés par des tandems de scientifiques et de scénaristes professionnels, afin de leur donner toutes leurs chances auprès des diffuseurs télévisuels 

  • attribuer des aides financières : les projets ayant donné lieu à la conclusion d’un contrat de développement entre des chercheurs et des producteurs, recevront des aides financières qui pourraient être de l’ordre de 50 000 euros par projet de film.


Environ 10 projets pourraient être soutenus chaque année.

L’INSERM a accepté d’assurer la gestion du GISC.


Il convient maintenant de mettre en place dès que possible ce projet de développement de l’audiovisuel scientifique.

 


3- Soutenir des projets innovants.


L’Institut de Recherche et de Développement – IRD a présenté un projet " Images, sons et sciences pour le développement " qui a pour finalité la mise en valeur par l’image et le son, des résultats de la recherche utiles aux pays en développement, produits par ou avec l’IRD, toutes disciplines confondues.

Ce projet conçu comme un laboratoire commun transversal représente un médiateur entre les scientifiques et les professionnels de l’audiovisuel. Il couvre l’ensemble des activités de cette filière et a pour missions :


  • assurer la veille technologique du domaine image et son 
  • promouvoir les nouvelles technologies de l’image et du son auprès des scientifiques de l’IRD et de ses partenaires, notamment par le biais de la formation 

  • produire des réalisations audiovisuelles 

  • consolider la banque images et sons ;

  • diffuser et promouvoir les productions audiovisuelles 


Le Ministère de la Recherche soutient déjà l’IRD, qui pourrait être soutenu par d’autres ministères.

 

 

 

 

 

 

 

IV – L’édition scientifique.

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L’édition scientifique constitue un secteur très diversifié (annales, manuels de cours, titres de référence, ouvrages de recherche…) et un marché de niches où se côtoient grands éditeurs historiques et nouveaux entrants très spécialisés.


Pour les éditeurs français, le marché des sciences porte essentiellement sur les ouvrages d’enseignement (étudiants des classes préparatoires et des BTS, pour lesquels les éditeurs peuvent s’appuyer sur un programme officiel) et dans une moindre mesure, sur les ouvrages à destination du monde professionnel (ouvrages relatifs aux normes, aux réglementations…).


Sur le marché universitaire, sans réel programme national, le tirage moyen de chaque ouvrage est beaucoup plus bas et certains éditeurs qui n’étaient pas spécifiquement sur ce créneau ont définitivement renoncé à ce marché qui se rétrécit.


Pour la recherche, les grandes maisons d’édition françaises laissent progressivement la place à de petites structures très spécialisées ainsi qu’à des structures de l’édition publique ou parfois même aux grands groupes spécialisés internationaux.

L’édition scientifique est regroupée dans les statistiques annuelles du Syndicat National de l’Edition dans la catégorie " scientifique, technique et professionnelle " et elle se décompose ainsi : sciences pures, médecine, techniques et sciences appliquées et économie d’entreprise.

Le chiffre d’affaires de l’édition scientifique s’élève tous formats confondus, à 135,8 millions d’euros pour 2002, soit 5,7 % du chiffre d’affaires global de l’édition. Il est relativement stable depuis dix ans.

Il convient toutefois de trouver aujourd’hui un équilibre entre les droits d’auteur et le traitement spécifique dont doivent bénéficier enseignants et chercheurs pour assurer leur mission de transmission des connaissances.

Plus de 7,5 millions d’exemplaires ont été vendus en 2002, soit 2 % du nombre total d’exemplaires vendus par l’édition française. L’évolution des ventes au détail d’ouvrages scientifiques est juste en-dessous de la moyenne du marché depuis huit ans.

2 704 nouveautés ou nouvelles éditions ont été publiées dans cette catégorie en 2002 (+ 1 172 titres réimprimés) représentant 9,4 millions d’exemplaires produits (+ 15,6 millions en réimpressions).

Le tirage moyen est de 6 440 exemplaires mais, il peut varier considérablement d’une sous- catégorie à l’autre (1 822 en moyenne pour les titres d’économie d’entreprise à 23 670 en moyenne pour les titres en médecine).

L’édition scientifique en format de poche représente 3,8 millions d’euros pour 907 000 exemplaires vendus et 137 nouveautés ou nouvelles éditions (+ 83 titres réimprimés) pour 725 000 exemplaires produits (+440 000 en réimpression).

Ainsi, malgré de très grands succès éditoriaux, (par exemple, l’ouvrage de vulgarisation de G. Charpak Devenez sorciers, devenez savants a constitué la meilleure vente " essais et documents " en 2002, avec plus de 200 000 exemplaires vendus) le secteur des sciences et techniques rencontre en France des difficultés qui s’accentuent, qu’il s’agisse d’ouvrages destinés à un large public ou de documents " pointus " de niveau universitaire.



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Les métiers de l’Edition rencontrent de nombreuses difficultés. Le marché de l’Edition en France subit l’influence de plus en plus grande de la presse étrangère scientifique. En effet, l’édition étrangère bénéficie de moyens supérieurs, ce qui lui permet d’augmenter sa marge par rapport au marché français de l’édition.


  • Les éditeurs doivent aussi faire face à la place grandissante du numérique et d’Internet, deux secteurs qui ont produit le développement d’un lourd contentieux en matière de droit d’auteur.
  • La situation devient également préoccupante pour bon nombre de " petites maisons d’édition " asphyxiées par le poids écrasant de la concurrence (étrangère) et l’avenir des métiers de l’édition paraît aujourd’hui bien sombre.
  • On s’aperçoit enfin que dans les bibliothèques, les abonnements, revues, presse, sont en passe de détrôner le livre dit classique, situation déplorable face à laquelle la vigilance doit être de mise.

Pour faire face à ces difficultés, il faut donner la capacité et les compétences aux bibliothécaires en matière scientifique. Il faut engager une politique de soutien au dispositif des bibliothèques scientifiques.

 

 

 

 

 

V – Le rôle essentiel des bibliothèques
et des établissements publics culturels pour la diffusion de
la culture et de l’information scientifique et le nécessaire
renforcement de l’offre éditoriale.

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Il est primordial que les bibliothèques, dans le cadre de leurs missions, tendent à favoriser la diffusion de l’information scientifique et technique auprès de l’ensemble des usagers, à commencer par les jeunes (6 744 000 inscrits dans les bibliothèques municipales, dont 2 476 000 de moins de 14 ans, selon les dernières statistiques disponibles -2001), ce qui représente 20% de la population desservie.

Or, la part faite à la culture scientifique et technique, qu’il s’agisse de collections ou d’emprunts, peut être considérée comme faible, voire très faible, dans les bibliothèques territoriales. Les grandes bibliothèques, à commencer par celles de l’Etat (Bibliothèque Nationale de France, Bibliothèque d’Information du Centre National d’Art et de Culture Georges Pompidou, médiathèque de la Cité des Sciences et de l’Industrie) disposent d’une offre abondante et de qualité, qui attire notamment des professionnels. Il en va de même pour la bibliothèque municipale de Lyon, par exemple.

Toutefois, il apparaît que la situation est beaucoup moins favorable si l’on considère l’ensemble du réseau des bibliothèques publiques soit, en 2001, 3 000 bibliothèques municipales et 97 bibliothèques départementales de prêt. On estime couramment à 7 % la part représentée par les sciences et techniques dans les collections d’imprimés, chiffre qui semble insuffisant au regard des enjeux.

Ce phénomène résulte de la convergence d’un ensemble de facteurs, dont les principaux sont les suivants : la prégnance de la culture à dominante littéraire de la majorité des bibliothécaires eux-mêmes ; la nature de l’offre éditoriale, qui pâtit à la fois de manques, et ne possède pas de " visibilité " particulière ; le coût pour les bibliothèques, qu’il s’agisse d’imprimés ou de documentation en ligne, à la fois en termes d’achat (du moins pour les ouvrages spécialisés et les abonnements aux ressources électroniques) et d’usage (du fait du risque non négligeable de vol ou de détérioration, et de la fréquence du renouvellement obligatoire dans des domaines comme l’informatique, par exemple).

Il convient également de mentionner la difficulté à répondre à des attentes très diversifiées des usagers, parmi lesquelles on peut distinguer trois grandes catégories d’utilisateurs : les professionnels, comprenant des utilisateurs soucieux de reconversion ; le " grand public ", comprenant notamment les autodidactes susceptibles d’acquérir des connaissances approfondies, les " amateurs " (d’astronomie par exemple), les demandeurs de renseignements pratiques, en particulier dans le domaine médical et les étudiants, demandeurs à la fois de manuels et d’informations " pointues ".

Qu’il s’agisse de la production (édition) ou de la diffusion (bibliothèques et librairies), il semble donc que la question centrale réside dans la possibilité d’améliorer et de renforcer l’existant, afin d’accroître, pour toutes les catégories de public, la possibilité d’accéder à des sources d’information adaptées à des goûts et des besoins très variés.

Le Centre National du Livre pourrait prêter une attention toute particulière aux demandes présentées par les bibliothèques territoriales pour l’enrichissement et la diversification de leurs collections d’imprimés dans les domaines scientifiques et techniques, en accordant une bonification des subventions versées et en suivant le projet sur plusieurs années.


1 - Renforcer les collections des bibliothèques dans le domaine des sciences et techniques.



    1. Renforcement des dispositifs d’aide du Centre National du Livre –CNL.


    2. Le Centre National du Livre, qui verse des subventions aux collectivités territoriales pour favoriser la diffusion de livres de rotation lente dans leurs bibliothèques, pourrait prêter une attention particulière aux demandes présentées par les bibliothèques territoriales pour l’enrichissement et la diversification de leurs collections d’imprimés dans les domaines scientifiques et techniques, en accordant une bonification des subventions versées et en suivant le projet sur plusieurs années.

      Par ailleurs, parallèlement aux aides accordées à la production éditoriale dans le cadre de la commission " littérature scientifique et technique ", qui concernent le plus souvent des ouvrages spécialisés, une " librairie des sciences et des techniques " destinée à soutenir des ouvrages de vulgarisation de qualité, y compris dans le cadre de traduction d’ouvrages étrangers pourrait être créée avec la Cité des Sciences et de l’Industrie


    3. Diffusion d’une bibliographie pour la constitution de collection de référence " de base ".




S’il existe déjà quelques ouvrages de référence en la matière, il serait nécessaire que l’ensemble des bibliothèques publiques et territoriales, et notamment les plus modestes d’entre elles, puissent disposer d’une bibliographie sélective, hiérarchisée, commentée d’ouvrages de vulgarisation de qualité, leur permettant de constituer des collections " de base " dans les différentes disciplines des sciences et techniques.

Cet outil s’intéresserait non seulement aux livres, mais aussi aux périodiques et surtout aux supports sous forme électronique et numérique (cédéroms, DVD, sites Internet), qui constituent dans ces domaines des sources d’information de premier ordre.

La BPI Bibliothèque Publique d’Information, qui publie régulièrement de tels ouvrages, et qui est appelée à jouer un rôle particulier au bénéfice des équipements de proximité dans le cadre du programme national engagé en 2003, pourrait être chargée de sa réalisation en liaison avec la médiathèque de la Cité des Sciences et de l’Industrie.

 

2 - Renforcer le rôle des établissements publics du Ministère de la Culture au b&e